Le livre s'intitule « Recherche le peuple désespérément » et il entreprend l'examen sans concession du divorce de la gauche (surtout le PS) avec le peuple. Le constat de Brustier et Huelin est en effet accablant. Les classes populaires, ouvrières, précaires, la jeunesse, les exclus, les chômeurs, toutes ces couches qui devraient voter PS ne votent plus pour l'ancien parti de Jaurès, Blum et Mitterrand. Comment le pourraient-elles d'ailleurs, dans la mesure où les ouvriers représentent aujourd'hui 5% des adhérents du PS contre 10% en 1985?
L'intérêt du livre est de s'attaquer aux causes de ce divorce en délivrant une grille de lecture originale qui n'est pas sans rapport, du reste, avec l'identité française. Les auteurs se livrent donc à un examen tout simple: la géographie sociologique du pays. Ils démontrent brillamment comment la France s'est coupée en deux depuis trente ans. Il existerait une France urbaine, « boboïsée », cool, aisée, élitaire. Et au delà de ces centres urbains, à la périphérie, dans les banlieues, dans les campagnes, s'est développée une autre France, abandonnée, précarisée, exploitée, délaissée. Une autre France, méprisée, moquée, vilipendée. Une France d'en bas qui ne montera jamais, sans espoir, sans perspectives. Une France qui travaille plus pour gagner de moins en moins. Une France de vieux et de jeunes que le système laisse sur le bas côté, à commencer par le PS.
Exemple: les auteurs expliquent ainsi (entre autres) le phénomène du CNPT. La chasse, activité ludique est victime de tous les clichés du politiquement correct. Pour les prototypes comme le Hamon ou le Valls, coupés des vraies gens par 25 ans passés à hanter les officines du PS, le chasseur est un con rural, raciste et bas de plafond. Le vote chasseur est ainsi devenu le vote identitaire et réactif d'une bonne partie des oubliés ruraux de la gauche. Et les chasseurs ne sont pas les seuls à se replier sur des votes anti-PS, qui mènent au FN ou au sarkozysme.
Cela étant, les auteurs offrent au PS sur un plateau les clés politiques de la reconquête populaire, car cette France oubliée, méconnue, niée est aujourd'hui socialement majoritaire.
D'abord, ils déconseillent le recours à la simili gauche ultra, de Besancenot à Autain, les idiots utiles du sarkozysme, occupés à défendre dans les cafés branchés du centre de Paris des causes médiatiquement majoritaires mais populairement minoritaires.
Le PS doit aussi retrouver l'équation qui fit les grands succès de la gauche sous Mitterrand. Le PS doit renouer le fil qui permet d'identifier une majorité sociale et la muer en majorité politique. Au début des années 80, le PS avait théorisé cet objectif autour de la notion de Front de classe. Aujourd'hui, les auteurs proposent la constitution d'une « coalition sociale majoritaire » appuyée sur un « projet républicain ». C'est à peu près la même chose. Et ça peut donner les mêmes résultats. Mais pour y parvenir, il ne faut pas avoir peur d'être socialiste, de sortir de Paris, de parler avec des vraies gens, de prononcer des mots comme « ouvrier », « peuple », « classe sociale »... Tout un programme...
La conclusion s'impose d'elle même. Si le PS veut regagner la confiance des classes sociales abandonnées à la bordure des grandes villes, il doit absolument renoncer à la posture morale et boboïsée surfant sur la vague de l'émotion médiatique, falsificatrice et manipulée qui règne sans partage sur les centres villes devenus des ghettos élitaires. S'en prendre aux moeurs de Frédéric Mitterrand ne suffit pas à faire peuple, car cela ne règle pas les problèmes de ce même peuple et ça l'incite à voter pour l'original incarnant l'ordre moral. Simple non?
Bruno Roger-Petit, le 31 octobre 2009
http://www.lepost.fr/article/2009/10/31/1768226_encore-un-livre-sur-le-ps-qui-va-faire-peur-a-valls-et-hamon.html
Bruno Roger-Petit ou l'hopital qui se moque de la charité !
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