Jean-Philippe Huelin est professeur d’histoire-géographie au lycée Jean-Michel de Lons-le-Saunier. Ancien responsable national du MRC (Chevènement), il fut membre du Parti socialiste dans le Jura pendant six ans (2006-2012) et candidat à l’élection cantonale de Moirans-en-Montagne en 2011. Par ailleurs, co-auteur de deux essais politiques, « Recherche le peuple désespérément » (François Bourrin éditeur, 2009) et « Voyage au bout de la droite » (Mille et une nuits, 2011), il est aujourd’hui sur la liste de Jacques Pélissard à Lons-le-Saunier. Explications…
Sur les réseaux sociaux, certains de vos (ex ?) amis crient à l’opportunisme et pensent que c’est un règlement de compte contre les dirigeants socialistes jurassiens. Un communiqué de premier secrétaire fédéral du PS précise qu’ « aucun autre candidat présent sur une autre liste ne peut se prévaloir d’appartenir à notre famille politique. » Que leur répondez-vous ?
J’ai été formé à la politique par Jean-Pierre Chevènement. L’idée que je me fais donc de l’engagement politique est charpentée par son modèle. Je ne crains ni de déplaire, ni de prendre mes distances avec ceux dont je suis proche si je juge qu’ils s’égarent. Or le PS jurassien s’égare et tous ceux que je considère encore comme mes amis, malgré leurs critiques parfois acerbes, le savent très bien. J’aurais aimé ne pas être le seul, ou presque, à le dire au sein du PS jurassien. Je n’ai pas été entendu, j’en ai tiré les conséquences mais mes camarades ne peuvent pas dire qu’ils n’ont pas été prévenus…
Quitte à choquer ou surprendre, je me sens humainement et moralement plus proche du maire de Lons que du président du Conseil général et de ses suiveurs. Mais ce n’est pas en ma qualité de socialiste (non membre du PS) que Jacques Pélissard a fait appel à moi, il se moque des étiquettes et me reconnait une certaine valeur qui ferait de moi un élu en mesure d’apporter quelques chose à la collectivité. Sa confiance m’honore.
Mais votre attitude est une trahison pour la gauche ?
Parce que financer avec de l’argent public une compagnie low cost comme Ryanair qui exploite ses salariés et se fait condamner par la justice française pour travail dissimulé, le tout pour permettre aux plus aisés de partir en vacances au soleil pas cher alors que les plus modestes galèrent pour se chauffer ou pour trouver un emploi, c’est être de gauche ? Parce que préparer un pont d’or à Leclerc qui écrase les petits producteurs et cannibalise le petit commerce, pour faire sortir de terre au Rocher une zone commerciale de plus, inutile économiquement et dévoreuse de surface agricole, c’est être de gauche ?
Il a les paroles et il y a les actes. Jugeons les responsables politiques sur leurs actes. Il faut sortir de l’envoutement des étiquettes électorales qui ne veulent rien dire, surtout dans le Jura ! Quand un militant de gauche, sincère, en est à défendre l’imposture et l’incompétence au pouvoir sous prétexte que l’élu est « de gauche », c’est vraiment inquiétant ! Je compte sur la clairvoyance des électeurs lédoniens pour faire la différence entre la vraie et la fausse monnaie. Comme les Jurassiens, je préfère « les faiseurs aux diseurs ». Selon moi, Jacques Pélissard est un « faiseur », je laisse les « diseurs » à leur fiel et à leurs bassesses.
Je veux pourtant rassurer mes amis qui s’inquiètent pour moi. Je ne rejoins pas un candidat UMP. Je n'épouse pas toutes ses idées. Indépendant je suis, indépendant je resterai. Ma liberté n’a pas de prix n’ayant pas besoin de la politique pour vivre.
Comment s’est effectué votre rapprochement avec Jacques Pélissard ?
Jamais je n’ai projeté de devenir conseiller municipal à Lons ! Jacques Pélissard a pris contact avec moi. Nous nous sommes vu à plusieurs reprises, nous avons longuement échangé et nous avons constaté, avec une certaine surprise, nos convergences sur l’avenir du Jura et du bassin lédonien en particulier. Comme lui, je crois en la nécessité de construire des majorités d’idées. J’ai donc fait le choix de saisir sa main tendue.
Politiquement, je lui sais gré de ne pas avoir succombé à la droitisation de l’UMP. Il est resté gaulliste dans la mesure où il privilégie l’intérêt général sur les intérêts partisans. C’est ce qu’il fait en tant que président de l’Association des Maires de France où il ne s’est jamais laissé instrumenter à des fins partisanes.
C’est ce qu’il a fait à Lons où il a su s’appuyer sur une réalisation de l’équipe précédente (menée par un maire communiste), je veux parler du restaurant municipal, pour en faire une référence nationale. Cette réussite repose sur la confiance qu’il a su tisser avec un élu écologiste, Jacques Lançon, et les résultats sont là : assainissement des zones de captage d’eau, soutien aux producteurs et aux produits bio, regain des circuits courts.
Je veux aussi parler de la médiathèque-cinéma pour laquelle il a eu l’intelligence de suivre les conseils avisées de Christiane Ayats qui, elle aussi, fut brocardée par certaines personnes « de gauche », mais qui a la fierté d’avoir œuvré dans l’intérêt des Lédoniens.
Que voulez-vous apporter à la vie politique locale ?
Ma contribution vise d’abord à démontrer que l’on peut se retrouver, par delà des divergences nationales qui demeurent, pour les transcender et agir localement.
Notre démocratie est en crise. La nation, socle de cette démocratie, a été attaquée par l’alliance du marché et d’une idée européenne dévoyée en technostructure néolibérale. Leur ayant abandonné les leviers de commande de l’Etat, les représentants du peuple ont vu leur crédit largement amoindri. Aujourd’hui, la défiance entre le peuple et ses représentants est de plus en plus inquiétante or seuls les élus municipaux conservent cette confiance nécessaire à la stabilité de notre République. C’est donc par les communes et les intercommunalités, ces petites Républiques, ces briques de base de la démocratie, que l’on pourra reconstruire une démocratie assainie et revivifiée.
Pour Lons-le-Saunier, j’ai fait des propositions à Jacques Pélissard qui seront sans doute en partie reprise dans le programme de la liste. L’idée générale de tout ce que nous entreprendront devrait être de partir de nos acquis, de compter sur nos propres forces pour inventer un avenir désirable et plus humain. Je ne crois pas aux projets « soucoupe-volante », comme celui d’Eco-parc au Rocher, qui arriveraient du ciel et résoudraient toutes nos difficultés. C’est de la poudre aux yeux, ce n’est pas sérieux ! C’est aussi contre cette politique de l’esbroufe que je me suis entendu avec lui.
Il est plus que temps que les personnes de bonne volonté se rassemblent pour l’avenir du Jura. C’est la mission que nous nous sommes assignés avec mon camarade Arnaud Deborne. C’est à cela seul que je veux travailler.
Hebdo 39
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