mercredi 10 mars 2010

Elections régionales : le PS semble retrouver le peuple

La gauche a-t-elle retrouvé le peuple ? Trop tôt pour le dire. Néanmoins, les sondages des régionales montrent que dans de nombreuses régions, c'est grâce à l'électorat des ouvriers et des employés que le Parti Socialiste creuse l'écart. Reste désormais au PS à se reposer la question sociale pour s'adresser à cette France des oubliés.

Vingt ans ! Vingt ans que le peuple s'éloigne de la gauche. C'est en 2002 que le PS touche le fond: 13 % des chômeurs et 11 % des ouvriers seulement votent pour le candidat du PS. Le PCF obtenait alors 1% des voix ouvrières contre plus de 30 % pour Jean-Marie Le Pen. Difficile de tomber plus bas. Une histoire électorale analysée dans le livre de Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin intitulé Recherche le peuple désespérément.

En 2007, Royal fait un score honorable à l'élection présidentielle sans parvenir à réconcilier les classes populaires avec le parti socialiste. Au premier tour, Jean-Marie Le Pen engrangeait 24% du vote ouvrier. Royal dépassait à peine Nicolas Sarkozy ( 20%) et François Bayrou (17%). Le PS avait négligé cette France des oubliés, censée avoir disparu, qui constitue encore 14 millions de personnes, soit un quart des électeurs. Après trois ans de gestion sarkozyste, c’est la droite qui paye la facture de sa gestion et le Front national a, moins que par le passé, cette fonction de vote « recours » ou vote « sanction ».

Sarkozy absent des tribunes, le constat est sévère, il était le seul à être capable de faire gagner son camp. Les candidats aux régionales n’ont pas « l'audace » d’en appeler à la mémoire de Jaurès pour vanter les mérites d’une quelconque politique de transports collectifs. De la même manière qu’ils évitent soigneusement les références grossières à une culture ouvrière qui leur ouvrirait l’accès aux voix des masses populaires, alors que les usines ferment les unes après les autres.

Les sondages font apparaître un net retour à gauche du vote des ouvriers et employés avec des scores frisant les 70% au premier tour à gauche (de Lutte ouvrière à Europe écologie) et une moyenne de 35%, parfois 40%, pour le PS. La prudence reste de mise car déjà en 2007, sondeurs et politologues divers voyaient un reflux du vote ouvrier-lepéniste en faveur du PS.

Des candidats UMP délaissés par les classes populaires

En Poitou-Charentes, c’est clairement sur cette catégorie de population que Royal creuse l’écart par rapport à ses concurrents du premier tour: 46% de vote chez les employés (84% pour l’ensemble de la gauche) et 37% chez les ouvriers (65%) .
Au second tour, la performance est encore plus remarquable. Le score est sans appel : 58% chez les ouvriers et 85% chez les employés. Bussereau est KO debout.
L’adhésion des classes populaires est sensiblement la même en Aquitaine. Chez les employés et les ouvriers Xavier Darcos affiche un retard de plus de 35 points ( !) sur Alain Rousset du PS.

Dans le nord, la présence de Marine Le Pen en cas de triangulaires change la donne. Chez les employés, le candidat PS Daniel Percheron fait carton plein avec 77% des voix (20% pour Valérie Létard de l’UMP et 3% pour Marine Le Pen). En revanche, Marine Le Pen recueillerait 30% du vote ouvrier devançant nettement Valérie Létard (17%). Daniel Percheron plafonne alors à 53%.

L’île de France est un cas à part, si Jean-Paul Huchon creuse nettement l’écart au second tour avec Valérie Pécresse. le vote de l’électorat populaire n’apparaît pas comme déterminant. Hormis chez les « artisans, commerçants » et les « professions libérales », Huchon devance toujours de près de 20 points sa concurrente.

Exclu du PS, en cas de triangulaires, Georges Frêche creuserait l’écart sur une liste PS ou Europe-Ecologie grâce au vote ouvrier, à celui des « inactifs » certes, mais aussi nettement grâce aux votes des professions libérales et cadres supérieurs. Bref, pas tout à fait raccord avec l'image de pur « popu », anti-élites, anti-parigots qu’il aime à donner de lui.

La gauche a-t-elle retrouvé le peuple ?

Comme le référendum sur le traité constitutionnel européen en 2005, ces élections régionales pourraient voir l’amorce d’une repolitisation des classes populaires. Mouvement déjà observé, lors des…régionales de 2004 où « les ouvriers sont clairement revenus à gauche » comme l’expliquait alors le chercheur du Cevipof Vincent Tiberj.

La rupture de la gauche avec l’électorat populaire semblait consommée. Sarkozy a réussi la performance de réconcilier la gauche et le PS avec son électorat historique. Il serait prématuré pour autant de dire que la gauche a regagné le « peuple ». Le PS, parti de notables, n’a pas beaucoup plus de choses à dire à ces catégories de populations qu’en 2002 ou 2007 et le « peuple » est, sur un plan électoral, une force de plus en plus indomptable et imprévisible. Une certitude cependant selon Gaël Brustier, docteur en science politique : «ce sont les classes populaires qui feront l’élection de 2012».

Régis Soubrouillard
Mercredi 10 Mars 2010
http://www.marianne2.fr/Elections-regionales-le-PS-semble-retrouver-le-peuple_a189724.html

1 commentaire:

  1. Un webdocumentaire pour revenir sur les enjeux de cette élection régionale, plus particulièrement en Aquitaine, où s'affrontaient le ministre du Travail Xavier Darcos et le président de l'Association des Régions de France, Alain Rousset

    http://vimeo.com/10576775
    http://carnetdecampagne.com/

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