lundi 30 mai 2011

Le salaire maximum: aujourd'hui dans Pater, demain dans la loi ?

Animateur du site « Pour un salaire maximum » et coauteur de « Voyage au bout de la droite » (Mille et une nuits, 2011), Jean-Philippe Huelin défend l'idée qu'une loi pour le salaire maximum serait un symbole judicieux pour la campagne présidentielle de 2012.

Histoire d'une complicité puis d'un affrontement entre un président de la République (Alain Cavalier, le réalisateur) et son Premier Ministre (Vincent Lindon), le film Pater avance et défend l'idée d'un salaire maximum indexé sur le salaire minimum selon un coefficient qui sur lequel les deux hommes sont en désaccord : le Premier Ministre pense que le ratio doit être de un à dix, le président penche pour un à quinze. Pater ne figure pas au palmarès du festival, l’honneur des festivaliers est donc sauf !

Loin de la Croisette néanmoins, l’idée fait son chemin depuis le lancement de la pétition de Marianne en 2009. Elle fait aujourd’hui partie du programme des principaux partis de gauche : écart maximum de 1 à 20 entre les plus bas et les plus hauts salaires dans chaque entreprise pour le Parti de gauche, revenu maximal qui correspondrait à 30 fois le revenu médian pour Europe écologie - Les Verts, même le PS y vient puisque dans son projet pour 2012, il propose « qu'au sein des entreprises qui ont une participation publique dans leur capital, les rémunérations soient comprises dans une échelle de l'ordre de 1 à 20. » L’avancée peut paraître timide par rapport aux autres partis de gauche, il n’en reste pas moins que c’est un progrès encore inenvisageable il y a quelque temps…

Dans cette précampagne présidentielle, le salaire maximum sert de marqueur. Il est de presque tous les discours de Jean-Luc Mélenchon qui n’hésite jamais, avec son verbe gouailleur, à ressusciter le Georges Marchais de 1981 qui disait sur le plateau de l’émission Cartes sur table : « Au-dessus de 4 millions (d’anciens francs), 100% d'impôt, je prends tout ! » Eva Joly le reprend à son compte sans que Nicolas Hulot, étrangement, n’en fasse autant. Rien encore du côté des candidats socialistes à la primaire mais Arnaud Montebourg devrait sans doute le défendre pour donner du contenu symbolique à son socialisme de transformation. N’oublions pas qu’un récent sondage de l'Ifop publié par L’Humanité (1) montrait contre toute attente que la mesure recevait le soutien de 75% des personnes interrogées.

Le salaire maximum serait certes une mesure symbolique, c’est sa limite mais c’est sa principale force. Comment entrer dans un débat aussi ardu que celui sur la fiscalité sans annoncer une rupture avec les excès de la période actuelle ? Le salaire maximum pourrait être l’accroche populaire à la révolution fiscale si brillamment défendu par le trio Landais-Piketty-Saez (2). On ne pourra pas faire croire aux Français qu’on va sérieusement réformer l’impôt sur le revenu en lui redonnant sa nécessaire progressivité sans fixer de limites à la goinfrerie des hauts salaires. Un nouveau partage entre travail et capital passe par un retour à une décence commune qui rend impossible des écarts de revenus de 1 à 400.

Le salaire maximum est donc une formidable arme dont pourra se saisir un candidat de gauche qui voudrait battre le président sortant au second tour. Pour retrouver un écho et une crédibilité dans les couches populaires, le candidat de l’alternative en aura bien besoin.

(1) L’Humanité du 11 janvier 2011
(2) Pour une révolution fiscale, Le Seuil, 2011

Marianne2 - Jean-Philippe Huelin - Tribune | Lundi 30 Mai 2011

lundi 23 mai 2011

Lutter contre la prolophobie, retrouver le peuple

Jean-Philippe Huelin, co-auteur de « Recherche le peuple désespérément » (François Bourin, 2009), était l’un des invités de l’Université Participative et Populaire, organisée samedi 14 mai à Villers-sur-Orge par Désirs d’avenir en Essonne et intitulée « Gauche/classes populaires : le divorce ? »

Essonne Info : Votre livre a servi de fil conducteur à cet après-midi de débat. Que démontrez-vous dans votre livre ?

Jean-Philippe Huelin : Nous avons voulu faire le bulletin de santé des couches populaires en France. Absents médiatiquement, de plus en plus méprisés, les ouvriers et les employés constituent encore près de 60% de la population active et leur vote est décisif lors des grands rendez-vous électoraux (référendum sur la Constitution européenne en 2005, présidentielle en 2007).

Essonne Info : Une note de « Terra Nova » sur la stratégie électorale pour 2012 a été publiée il y a une dizaine de jours, et recommande à la gauche d’assumer son éloignement avec les couches populaires. Qu’en avez-vous pensé ?

Jean-Philippe Huelin : Cette note assume les conséquences du tournant néolibéral entérinant la mondialisation que le PS a opéré sans jamais le revendiquer depuis 1983. Elle théorise a posteriori une stratégie électorale structurellement perdante pour la gauche, qui ne permet l’accession au pouvoir que très provisoirement, la gauche se montrant incapable d’inverser la droitisation des sociétés occidentales.

Essonne Info : Vous êtes donc en totale opposition avec Terra Nova, mais alors quelle stratégie adopter pour la gauche ?

Jean-Philippe Huelin : Il ne faut pas faire l’impasse sur la réalité de la géographie sociale française. La ligne de front politique passe à la fois par le Nord-est et par les zones périurbaines. C’est là que s’est opéré un réalignement électoral qui a porté la droite au pouvoir. Il y a une France des perdants de la mondialisation à qui l’accès aux villes est devenu impossible et qui est reléguée de plus en plus loin des centres. N’est-ce pas à eux que la gauche doit s’adresser ? Est-ce un hasard si ce sont surtout des ouvriers et des employés ? Une certaine prolophobie des élites de gauche empêche de voir que les solutions à apporter sont de deux ordres : économiques et sociales d’une part, culturelles et identitaires de l’autre.

Essonne info, 23 mai 2011

jeudi 19 mai 2011

jeudi 12 mai 2011

Vers une coalition sociale majoritaire incluant le monde rural ?

Cette semaine, je suis l'invité du site d'information Shogoun et devient donc "l’empereur de Shogoun" (pour la semaine seulement, mon républicanisme est donc sauf!).

Nul doute que le vote du monde rural sera un des enjeux du scrutin présidentiel de l’année prochaine. Le PS a fourbi ses armes en travaillant sur un « bouclier rural » qui a été défendu récemment dans le cadre d’une proposition de loi à l’Assemblée nationale alors que les députés UMP ruraux se regroupaient dans un groupe d’influence appelé « Droite rurale ».

Rappelons que l’élection présidentielle de 2007 s’est très largement jouée dans la capacité des deux principaux candidats à gagner l’électorat populaire, surreprésenté dans le monde rural. A ce jeu, le candidat Sarkozy a surclassé sa rivale puisque la candidate socialiste, qui a certes rattrapé quelques longueurs dans le vote ouvrier par rapport au désastreux résultat de Lionel Jospin an 2002, reste la candidate des villes quand Nicolas Sarkozy se faisait le champion du monde rural. En réalité, le vote socialiste suit un « gradient d’urbanité » : plus on est proche du centre des villes, plus le score Royal augmente. Loin de la « réalité médiatique », cette coalition sociale des bobos et des banlieues (pour faire très très court) est structurellement minoritaire, la fondation Terra Nova devrait se pencher avec plus de sérieux sur cette réalité. Le défi pour une gauche qui voudrait reprendre le pouvoir dans la durée est donc de reprendre pied, politiquement et culturellement, dans ce monde rural.

Pour ce faire, le « bouclier rural » aborde de front les deux chantiers prioritaires pour le monde rural mais aussi en réalité pour l’ensemble de nos concitoyens : la question de l’égalité, en particulier face aux services publics, et celle de l’emploi. A la première, le texte de la proposition de loi met intelligemment en avant le critère de la durée maximale du trajet entre chaque citoyen rural et les services essentiels. A la seconde, il répond équité en proposant des zones de développement économique rural favorisées par de nouveaux outils fiscaux, bancaires et réglementaires.

Cependant, la perspective doit être bien plus large qu’une série de mesures, aussi indispensables soient-elles. C’est la perception du monde rural par la gauche qu’il faut modifier, c’est la vision souvent méprisante et parfois empreinte de prolophobie des élites urbaines pour la ruralité qu’il faut changer. La gauche doit retrouver le sens de l’épaisseur géographique de la France car l’apparition d’un archipel métropolitain aspiré par le turbo-capitalisme, délaissant et rejetant l’arrière-pays rural est la conséquence géographique de la mondialisation néolibérale. Des élites intégrées d’un côté, des couches populaires de plus en plus écartées du cours du monde de l’autre, cette situation est inacceptable pour tout républicain conséquent.

Finalement, la défense du monde rural, dans cette dimension de la préservation de l’unité nationale et du maintien de l’égalité républicaine entre tous les citoyens, est une des modalités les plus pratiques du combat contre la globalisation.

Jean-Philippe Huelin, Shogoun, 12 mai 2011

dimanche 1 mai 2011

La NAR et "Voyage au bout de la droite"

Dans la revue de la Nouvelle Action Royaliste de Bertrand Renouvin, "Voyage au bout de la droite" est qualifié de "référence historique et document nécessaire à toute réflexion stratégique".