jeudi 24 décembre 2009

Slate.fr choisit "Recherche le peuple désespérément"

Jean-Laurent Cassely, journaliste de slate.fr, conseille la lecture de notre livre...

Catégorie Essai: Dessine-moi un électeur…

«Prolophobie»: c’est le terme qu’emploient les deux auteurs pour qualifier les sentiments qu’inspirent parfois les classes populaires à une élite de gauche un peu coupée du monde. Confortablement nichée dans des centres-villes douillets et «gentrifiés», cette élite ne voit plus vraiment la classe laborieuse qui s’est réfugiée dans le pavillon périurbain, désormais l’habitat ouvrier typique. Quant à la population rurale, c’est souvent en la beaufisant à grands coups de caricature que l’élite peut justifier son abandon progressif.

La fameuse fracture sociale entre le haut et le bas n’est donc pas indépendante d’une autre fracture, spatiale: dans les centres, les gagnants de l’économie de marché, au milieu et aux périphéries, tout le reste! Au-delà des très médiatiques (parce qu’explosives) banlieues difficiles qui jouxtent immédiatement les villes, se trouve un gros machin excentré et dispersé que l’élite ne croise plus. Un gros machin électoral qui, faute d’intéresser la gauche, continuera d’offrir à la droite de beaux lendemains électoraux…

Gaël Brustier, Jean-Philippe Huelin, Recherche le Peuple désespérément - Bourin éditeur– 17€

dimanche 20 décembre 2009

Où en est le débat sur les classes sociales?


Retour sur la soirée organisée par la Laboratoire des idées du PS grâce au site nonfiction.fr:

Le Laboratoire des Idées organisait mercredi 16 décembre un débat sur l’idée de classes sociales. Les participants livrèrent leur points de vue riches et variés sur une notion enterrée par les sciences sociales dans les années 1970 et 1980, et brutalement remontée à la surface depuis. Christian Paul, président du Laboratoire des Idées, lança le débat autour de trois questions centrales :

1) Dans quel sens peut-on parler de classes sociales ? Quelle est la bonne lecture de la société française à partir de ce concept ?
2) Comment décrire aujourd’hui les transformations qui bouleversent la société française, et leurs effets sur la stratification de la société ?
3) Qu’est-ce que ces clivages par classes produisent dans la démocratie française ?

Le sociologue Camille Peugny, auteur d’un ouvrage remarqué sur Le Déclassement, ouvra la discussion en décrivant l’évolution des inégalités sociales. Il fit remarquer que la nécessité de ce débat n’était pas le résultat d’une réémergence des classes sociales, qui n’ont jamais disparu, mais d’un retour de cette question dans les sciences sociales. Revenant sur le débat d’une "moyennisation" de la société à la suite des Trente Glorieuses , Camille Peugny indiqua quelques critères qui permettent d’affirmer que les inégalités sociales augmentent aujourd’hui, tels que l’augmentation continue des plus hauts revenus, une hausse de l’espérance de vie moyenne plus forte que celle des ouvriers, et un élitisme renforcé des grandes écoles en comparaison avec les 3è cycles universitaires. Aujourd’hui, la peur du déclassement et du chômage et la crispation envers les exclus minent la mobilité sociale. Il est donc de plus en plus difficile de réconcilier les exclus et les classes populaires qui ont un travail, car ils n’ont plus de conscience de classe en commun. Le problème consiste en grande partie à savoir à qui l’on s’adresse lorsqu’on parle des défavorisés. En effet, 80% des Français, d’après des enquêtes récentes, se diraient membres des classes moyennes. Parle-t-on donc aux classes moyennes qui croient l’être, ou aux classes populaires qui le sont objectivement ?

Le débat continua avec l’intervention de deux autres sociologues, Isabelle Coutant et Yasmine Siblot, coauteures avec Marie Cartier et Olivier Masclet d’une enquête sur les attitudes politiques des habitants d’un quartier pavillonaire de Gonesse, au nord de Paris . Elles présentèrent le travail de terrain qu’elles ont mené pendant trois ans pour tenter de comprendre comment votent les habitants, pour la plupart issus des classes populaires, ayant accédé à la propriété. Elles ont constaté que l’assimilation de la propriété privée et du vote à droite était loin de se vérifier. Le vote de ce quartier inhabituellement enclin à aller voter était, sur le long terme, partagé entre la droite et la gauche. Selon elles, le vote à droite et à l’extrême droite d’une partie de ces habitants s’explique par une attirance pour le discours stigmatisant l’assistanat, et une vision triangulaire de la société : il y a « eux » les riches au-dessus de nous, et « eux » les assistés en-dessous de nous. Ce constat faisait valoir encore une fois la désarticulation du lien social entre les « petits » et « petits-moyens ».

Enfin, les politologues Gael Brustier, coauteur de Recherche le peuple désespérément , et Stéphane Rozès ont finement resitué ces problèmes sociologiques dans le cadre des discours et représentations politiques qui les accompagnent. Le premier exhorta le Parti Socialiste à abandonner la sociologie minoritaire des « villes-centres » pour réintégrer la dimension spatiale de la société française dans ses perspectives. Le second rappela pourquoi c’est une erreur de penser que les Français ont adhéré aux thèses économiques libérales. La pensée majoritaire à son sens est antilibérale économiquement et se retrouve dans une part de la population conservatrice profondément attachée à l’engagement de l’Etat dans le marché. L’idée de Marx selon laquelle la fin du capitalisme signifierait une rupture du salariat avec les rapports sociaux se trouverait aujourd’hui inversée. Ce serait le salariat qui voudrait maintenir les rapports sociaux par crainte du déclassement, et ce serait les cadres, mobiles et transnationaux, qui permettraient le développement des forces productives. C’est ainsi que le discours de Nicolas Sarkozy en 2007 aurait trouvé un écho favorable au 1er tour des élections présidentielles à travers son articulation du distinct et du commun. Ce discours jouait les imaginaires des uns, « la France qui se lève tôt », contre celui des autres, « les assistés, les exclus ». Cependant, pour Stéphane Rozès, les exclus en tant que classe sociale n’existent pas puisqu’ils se définissent toujours positivement vis-à-vis des autres. Ce qui nous renvoie à la difficulté pour la gauche de parler clairement de (et à) ceux qu’elle cherche à rassembler derrière elle.

Cette soirée fort stimulante intellectuellement donna à donc à réfléchir aux militants venus nombreux écouter des enseignements qu’on ne regretterait de ne pas retrouver dans les discours politiques de leurs dirigeants.

http://www.nonfiction.fr/article-3004-p1-ou_en_est_le_debat_sur_les_classes_sociales.htm

vendredi 18 décembre 2009

La gauche peut-elle retrouver les prolos ?


En raison d'évolutions de long terme, et aussi sous l'effet de la crise, les différences de sensibilité politique et culturelle n'ont jamais été aussi faibles entre les classes populaires et les classes moyennes. Le temps est sans doute venu pour les partis de gauche de se défaire d'une vision dégradante des prolos, et de reconstruire une vraie majorité populaire.

Les ouvriers sont-ils de retour ? Une note récente de la Fondation Jean Jaurès intitulée « Les ouvriers français, valeurs, opinions et attentes » laisse entrevoir une réhabilitation de la classe ouvrière dans les discours politiques et, plus largement, un retour en force des thématiques des classes populaires. Ce n’est pas aussi flamboyant qu’un « Lip dub » mais, pour les socialistes et la gauche, c’est peut-être l’ébauche d’un nouveau rapport avec les classes populaires.

La gauche s’était progressivement mais sûrement éloignée de son électorat populaire après 1983. L’offensive du FN sur l’électorat populaire de droite à partir de 1983 puis de gauche au cours des années 1990 avait contribué à couper peu à peu la gauche des ouvriers et des employés. Rappelons les faits : en 2002, 1% des ouvriers ont voté pour le PCF, 11% ont voté pour le PS ! Et si Ségolène Royal a redressé la situation en 2007, il ne faut pas mésestimer le retard pris par la gauche dans l’électorat ouvrier et en particulier chez… les ouvrières ! Ces dernières, plus fragiles socialement que les ouvriers, ont massivement soutenu Nicolas Sarkozy au premier tour.

L’analyse de Jérôme Fourquet démontre que les ouvriers ne sont ni plus racistes ni plus homophobes que la moyenne des Français. C’est peut-être la fin d’un mythe, celle d’un peuple réduit à la figure de «Dupont-Lajoie ». Cela ferait le plus grand bien à la gauche de sortir enfin d’un certain racisme social et de la figure du « beauf » véhiculée par Charlie Hebdo, organe officiel de la prolophobie. Jérôme Fourquet décrit une France ouvrière manifestement beaucoup moins rétive au « libéralisme culturel » et sociétal qu’il n’y paraissait si l’on se référait aux discours élitaires. Il semble ainsi que 72% des ouvriers français acceptent l’homosexualité comme « une façon acceptable de vivre sa sexualité » contre 77% pour l’ensemble des Français. Ainsi également, sur la question de l’immigration ou des sans-papiers, il semble bien que les ouvriers, du moins les plus jeunes, n’en fassent pas une priorité puisqu’ils parlent moins des sujets qui lui sont reliés que la moyenne des Français.

Cette mise au point qui règle son compte à nombre d’idées reçues révèle ainsi la fin de la priorité donnée au sociétal sur le social. Les ouvriers sont, depuis plus de deux décennies, les principales victimes de la profonde mutation sociale que connaît notre pays sous le choc de la globalisation. Ce dernier point est le plus problématique… Quand l’auteur pointe le fait que les séquestrations de patrons sont beaucoup plus acceptées par les ouvriers que par l’ensemble des Français, ne faut-il pas voir enfin que la « lutte des classes » est, comme le disait François Mitterrand, un « fait » qu’il s’agit simplement de constater. Il est donc logique qu’en conclusion, Jérôme Fourquet fasse l’hypothèse « que c’est d’abord sur l’équité fiscale et la juste répartition des richesses que devraient aujourd’hui se déterminer électoralement les catégories populaires. »

Cependant, il est une réalité que l’auteur n’aborde qu’à moitié : celle de la géographie sociale des classes populaires. Certes, il y a une France ouvrière du Nord-ouest plus ouverte sociétalement que la France ouvrière du Nord-est. Mais l’essentiel n’est pas là, il réside dans la fracture béante entre une France des centres-villes et une France périphérique (périurbaine et rurale), entre une France connectée à la mondialisation néolibérale et devenue partie intégrante du « village global » et une France qui paye au quotidien le prix de la globalisation financière. Son potentiel déflagrateur est-il analysé ? En faisant de la seule « banlieue », des « quartiers », l’incarnation exclusive de la France populaire, les dirigeants de gauche ont souvent oublié de parler à la France des dominés. En remplaçant le prolétariat par les exclus, ils ont aussi acquis un rôle : celui de confesseur du système néolibéral, lui donnant l’absolution pour peu qu’il pratique charité et compassion humanitaire.

Il importe donc, en l’absence de parti tribunicien, de définir un projet républicain qui rassemble les Français; pas un catalogue de « bonnes intentions » mais une vision de la France qui répondrait à cette grande passion française, celle de l’égalité, hélas mise à mal par le cyclone du déclassement qui frappe notre pays. Il y a en France environ 60% d’ouvriers et d’employés et la situation de ces derniers est loin de correspondre au mythe de la « classe moyenne » qu’on lui faisait miroiter voici trente ans. Les stratèges de Nicolas Sarkozy ont d’ailleurs raison sur un point essentiel : ce sont les classes populaires, les ouvriers et les employés, le salariat des zones périphériques qui feront l’élection de 2012. Il est peut-être enfin temps d’en prendre conscience et de bâtir la coalition sociale majoritaire qui peut permettre de gagner en 2012 et de gouverner dans la durée.

Gaël BRUSTIER et Jean-Philippe HUELIN sont les auteurs de « Recherche le peuple désespérément », Bourin Editeur, octobre 2009

http://www.marianne2.fr/La-gauche-peut-elle-retrouver-les-prolos_a183134.html

mardi 8 décembre 2009

L'Hérétique suite...


Je poursuis la lecture du livre Recherche peuple désespérément, et j'en suis arrivé aux lignes dans lesquelles les deux auteurs font un tour rapide des discriminations qui frappent le peuple. Ils observent, par exemple, qu'une jeune issu d'un lycée rural a bien moins de chances d'entrer à science-po qu'un jeune des cités venu de Bobigny. Ils remarquent aussi que la gauche s'est polarisée sur les discriminations ethniques sans prendre garde que les discriminations sociales, aussi muettes que discrètes, étaient bien plus redoutables et prononcées. Tous les partis politiques soignent aujourd'hui leur "diversité". la diversité, c'est tendance, ça fait bien sur un plateau. Mais qui s"'indigne de ce que l'Assemblée Nationale ne compte plus un seul ouvrier dans ses rangs ? Fini les Monory garagiste, ou un Bérégovoy ouvrier-tourneur et premier ministre ! place aux élites embourgeoisées venus des centre-villes !

Il y avait ce week-end un congrès à Arras : le Mouvement Démocrate établissait un programme politique. Dans son discours de clôture, François Bayrou a évoqué une discussion avec Alain Dolium, actuel candidat à la tête de liste pour le MoDem en île de France ; Alain Dolium lui parlait alors des discriminations et voilà ce qu'il lui disait :

J'ai fait ce parcours. J'ai vécu ces discriminations et - une dont je parlerai dans un temps - mais on se tromperait en croyant qu'il n'y a que les garçons et les filles de peau noire ou d'origine étrangère qui vivent ces discriminations, parce que, a-t-il ajouté, les provinciaux à Paris, ceux qui ont de l'accent, ceux qui viennent d'ailleurs, ceux qui ne connaissent pas les codes, ceux qui ne savent pas comment on s'habille quand on sort dans le monde, ceux qui n'ont pas le parcours fléché, tous ceux-là vivent les mêmes obstacles.

Et Bayrou a alors conclu :

C'est bien de tous ceux-là dont nous prenons le destin en charge en ayant choisi les candidats que nous avons choisis. Il y a un peuple de travailleurs qui n'est pas représenté, un peuple de pauvres et, parfois, travailleurs et pauvres en même temps, un peuple de petits retraités - ma mère qui vient de s'en aller percevait pour sa retraite moins de 680 €. Je ne dis pas que ce soit rien, mais, après une longue vie de travail, ce n'est rien. Tous ceux-là constituent, pour nous, notre communauté d'origine, notre enracinement. C'est cet enracinement-là que nous allons porter dans cette élection.

Et moi, je le dis, je suis d'accord avec cette vision ; c'est d'ailleurs le sens de mes deux billets, l'un sur les ouvriers, l'autre sur la social-bourgeoisie. Et je pense, qu'au PS, Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin ont bien raison de se pencher sur la question. J'espère que leur réflexion ensemencera les programmes régionaux des Socialistes.

Pour nous, au MoDem, il ne nous reste plus qu'à bâtir des programmes régionaux qui intègrent ces populations oubliées, sans céder un pouce de terrain aux sirènes chics de la médiatisation urbano-centrée. Foin des métropoles, occupons-nous un peu du peuple...

http://heresie.hautetfort.com/archive/2009/12/07/c-est-quoi-une-discrimination.html

vendredi 4 décembre 2009

Où sont les ouvriers ? Où est le peuple ?


Un papier sur notre livre dans le blog de "L'hérétique", sympathisant MoDem qui trouve quelques vertus à cet ouvrage ce dont je ne peux que le remercier...en attendant la suite de sa critique.

Je parcours, depuis quelques jours, les pages de l'ouvrage de deux sociologues, Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin (tiens, un ancien du MRC...). Il s'intitule "Recherche le peuple désespérément". Ce livre s'adresse préférentiellement à la gauche, mais il m'intéresse beaucoup, parce que les observations faites par les deux auteurs recoupent une partie de mes interrogations et également bon nombre de mes observations.

En particulier, on a cru, au sein du landernau politico-médiatique (et pas seulement à gauche), à l'exclusion, malheureusement et il faut le dire, du Front National, que la classe ouvrière n'existait plus en France. Le PS, les communistes et même les Trotskistes se sont satisfaits des populations multi-assistées des logements sociaux des centre-villes ou des proches banlieues qui leur permettaient de se trouver une caution populaire à bon compte. Pendant ce temps, les classes populaires, repoussées bien au-delà des grandes banlieues, plongées dans une grande détresse, précarisées, affrontaient seules et abandonnées de plein fouet les effets pervers de la mondialisation.

Parce que l'industrie s'est réduite comme peau de chagrin, la gauche qui ne connaissait plus de classes populaires hors la bonne vieille industrie issue du XIXème siècle, n'a pas vu la précarisation croissante de tout un secteur de la population, péri-urbanisée, parfois rurale. Il a été plus simple d'y voir des beaufs, des électeurs du FN, des mineurs politiques dont il était préférable de limiter l'exercice des droits civiques, ces derniers ayant tendance à voter pas toujours comme il le fallait.

La gauche verdâtrisée a ignoré tous ces hommes et ces femmes, qui font jusqu'à 5 heures de trajet aller et retour pour venir travailler dans les métropoles, vivent dans des communes-dortoir de moins de 1000 habitants, n'ont d'autres choix pour se déplacer que d'utiliser leur automobile et ne connaissent plus des services publics que le nom que l'on en donne aux émissions télévisées, leur principale distraction.

Qui s'intéresse à ces gens ordinaires, qui vivent généralement de 100 à 200 kilomètres des grands centres urbains ? Quels partis politiques s'y déplacent ? Non, les préoccupations des populations boboisées des villes sont bien plus intéressantes, bien sûr !

Qui s'intéresse à la question ne sera pas étonné de découvrir que ces nouveaux ouvriers sont désormais en grande majorité des ouvrières...des femmes seules, souvent avec un enfant ou plus. La demande de productivité toujours plus forte a rendu la vie impossible aux ouvriers qui travaillent encore dans les secteurs industriels, d'autant que le maintien de leurs usines et ateliers dépend désormais de leur propension à faire mieux et moins coûteux que ceux des pays qui pratiquent le dumping social. L'externalisation des services, leur automatisation, mettent aussi sur le carreau les caissières, les opératrices diverses et variées, elles aussi soumises à des "objectifs" et à des cadences infernales.

La gauche, les verts, ont été très forts pour proposer de la culture, quelques allocations et empoisonner l'existence du petit peuple que désormais ces partis méprisent. Mais rien dans leurs propositions politiques, n'a été pensé pour leur redonner un espoir. Quant à la droite, sous l'égide de Nicolas Sarkozy, elle a consciencieusement appliqué le vieux principe qui dit que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent... Les visites dans les usines ? de la poudre aux yeux. Même le vieux thème porteur de la sécurité (qui s'appuie sur la peur d'un déclassement social toujours plus violent pour ces populations fragilisées) aura fait long feu. Je l'ai dit ce matin, le gouvernement réduit toujours plus les moyens de fonctionnement de la sécurité intérieure : le peuple n'aura même pas cette consolation-là.

La précarité ne touche pas seulement des ouvriers sans qualification, c'est toute une génération de jeunes diplômés, désormais, qui est assomée par la vie chère, par les CDD et l'incertitude de leurs revenus, même à bac+5. Les jeunes sont les premiers à faire les frais de cette nouvelle donne. Bac+5 et le SMIG, cela devient désormais la norme pour une part croissante de la jeunesse diplômée. Et même pour ceux qui disposent d'un emploi statutaire, garanti à vie, l'avenir demeure incertain : n'est-ce pas Robert Rochefort, euro-député MoDem, qui observait récemment que dans l'Académie de Versailles, près de deux cent enseignants reçoivent une aide alimentaire d'urgence de la part des services du rectorat ?

Je n'ai pas fini de lire le livre de Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin, j'en reparlerai donc ici. Je pense que sa lecture est salutaire pour tous les mouvements politiques. Je doute fort de recevoir les solutions préconisées par les deux auteurs, encore que, mais, j'estime que les populations péri-urbaines devraient faire l'objet de l'attention particulière de chaque parti.

En ce sens, j'appelle le MoDem à ne pas se laisser boboiser, notamment par des enjeux écologiques plaisants dans le principe, mais dont ces classes sociales feraient encore les frais. Le MoDem a été, je le crois, l'un des premiers partis à envisager sérieusement la nécessaire réindustrialisation de la France. Jean Peyrelevade, en particulier, en affirme l'absolue nécessité en raison de l'amplitude de la valeur ajoutée qui caractérise cette production économique. L'industrie n'a pas seulement un rôle économique, elle a un rôle social.

Ouf, c 'est l'une des priorités absolues du nouveau programme du MoDem. Dans ce programme, le premier chapitre porte sur l'économie, et le 1er sous-chapitre sur l'emploi. Le 13ème amendement du projet est le suivant : Développer l’emploi industriel par la relocalisation de certaines fabrications en France et en Europe ; évidemment, il faut le faire. Il faudra plancher même très sérieusement sur le sujet.

Ce sont les conditions de travail qui viennent juste après, dans le document préparatoire ; il y a un amendement, mais il n'engage à pas grand chose. Ce devrait être un axe prioritaire de notre réflexion.

Ensuite, nous devrions mener une réflexion sur la précarité qui ne se limite pas à l'industrie, mais qui touche les services et l'agriculture (et les ouvriers agricoles, alors !!!).

Soyons très clairs : ce n'est pas la peine de blablater sur le développement durable auprès des populations péri-urbaines. Ils ont d'autres choix à fouetter. Il faut leur proposer des solutions concrètes : par exemple, l'implantation d'une usine de production de panneaux photo-voltaïques, du côté d'Agen, c'est une réponse concrète.

Bref, nous autres démocrates et libéraux, reprenons la main et tendons-là aux populations abandonnées à leur sort depuis trop longtemps. Et ce n'est pas du lumpen-prolétariat des cités dont je parle, mais bien des honnêtes citoyens qui se crèvent la carcasse à ramener trois francs six sous chez eux. Ceux-là, personne ne leur dit jamais rien : innovons et incarnons, au MoDem, une véritable rupture. Si François Bayrou veut pouvoir continuer à parler au nom du Tiers État, il doit le prouver.

Ce n'est pas seulement le MoDem que j'invite à réfléchir, mais aussi les libéraux, qui se sont complètement désintéressés des classes populaires depuis un moment. Quelles propositions libérales pour les ouvriers ? Voilà un beau et délicat sujet de réflexion que les libéraux s'honoreraient à traiter avec d'autres réponses que les seul critères de productivité et de compétitivité...

http://heresie.hautetfort.com/archive/2009/12/04/ou-sont-les-ouvriers.html

samedi 28 novembre 2009

Notre travail vu d'Alsace


Une critique de notre livre issu du blog de la section socialiste de Mundolsheim :

Les deux auteurs de ce livre se sont appuyés, pour instruire leur démonstration, sur une documentation riche et variée et sur des éléments statistiques qui jusqu'alors avaient été plus ou moins négligés.

En guise d'introduction, ils rappellent le désamour qui signe désormais les rapports que les partis de gauche entretiennent avec les catégories populaires.
Ce faisant, ils s'attaquent à une représentation de "La France invisible", identifiée sous l'angle spatial, où ouvriers et employés sont rejetés à la périphérie des villes. Ce no man's land qui, faute de pouvoir se déterminer avec précision en vient à se décliner sous l'appellation de "rurbanité", sorte de néologisme résigné où se mélangeraient les apports de la ville et ceux du monde rural.

Ces territoires prenant la suite des banlieues voient leurs habitants, ni suffisamment exclus pour bénéficier des attentions des politiques sociales, ni suffisamment stigmatisés pour s'agréger aux stratégies des décideurs repliés dans les centre ville.

Ces oubliés des politiques sociales et de l'aménagement du territoire démontrent que la diversité qu'ils expriment ne reflète que très imparfaitement les connotations élaborées au sein des élites. Anonymisés, "ces petits moyens" constituent la majorité silencieuse, qui par son refus en 2002 comme en 2005 a exprimé un malaise profond que Nicolas Sarkozy a fort bien su instrumentaliser lors des présidentielles dans ses approches d'une société en crise.
Le livre se conclu par un appel à la gauche à décrypter ces colères qui montent face à la relégation territoriale et sociale, où ouvriers et employés recomposent à bas bruit l'essentiel d'une France rurale.

http://www.ps-mundolsheim.fr/article-recherche-peuple-desesperement-38582468.html

vendredi 27 novembre 2009

Interview sur la Radio publique luxembourgeoise

Voici deux extraits des journaux du 28 octobre 2009 de la radio publique luxembourgeoise 100.7. La présentation du journal est en luxembourgeois mais mes réponses sont en français ! Les Luxembourgeois sont plus particulièrement intéressés par nos développements sur le protectionnisme européen. Étrange, non ?

Journal du midi :
tilidom.com

Journal du soir :
tilidom.com

Le texte...et le son

Sur le lien suivant, une interview en ligne de Gaël Brustier sur les grandes thématiques de "Recherche le peuple désespérément" : http://luette.free.fr/spip/spip.php?article267

mercredi 18 novembre 2009

On ne peut pas plaire à tout le monde...

Un postscriptum de l'excellent Malakine dont on attend toujours la publication du premier livre...

mardi 17 novembre 2009

Rencontre au café du croissant


Gaël Brustier, coauteur de "Recherche le peuple désespérément" vous donne rendez-vous le JEUDI 26 NOVEMBRE A 18H30 pour une rencontre autour du livre au Café du croissant 146 rue Montmartre 75002 Paris. Métros Grands Boulevards, Bourse, Halles, Sentier...

lundi 16 novembre 2009

Des extraits de "Recherche le peuple désespérément" sur elunet.org


Le portail de l'action des élus et de la vie citoyenne publie des extraits du livre :

À l’heure de la crise pétrolière et de la crise des subprimes, l’habitat en pavillon péri urbain expose à une fragilité financière des populations nouvellement accédantes à la propriété déjà en situation de fragilité économique (précarisation de l’emploi, sur endettement...). Quand le remboursement du pavillon compte pour un tiers du budget et l’automobile pour un quart, il ne reste pas grand-chose pour vivre. C’est ainsi que ce que les médias appellent la crise des banlieues, dont la visibilité est plus aisée, cache en réalité une crise beaucoup plus grave et profonde qui a commencé à se manifester par la voie du vote. Alors que le candidat Sarkozy a su capter une bonne partie de l’électorat péri urbain, la gauche doit en grande partie ses défaites de2002 et 2007 à son incompréhension des désirs du monde pavillonnaire. Le péri urbain vaut mieux que les caricatures dressées par les élites urbaines.

La gauche serait bien inspirée de se pencher sur cette colère populaire qui monte face à la relégation territoriale et sociale. La crise risque d’être aiguë quand le pavillon, « abri antiglobalisation », se transformera en traquenard social.

Confortablement calé dans ses certitudes, le commentateur dispense son analyse des victoires de la droite dans les zones rurales comme une reproduction du vieux schéma électoral du XIXe siècle, celui qui voyait les paysans français porter Louis-Napoléon Bonaparte à la présidence de la République, élire l’Assemblée de Versailles en 1871 puis la Chambre introuvable de 1919... Il y eut certes des paysanneries progressistes, essentiellement dans le centre de la France, du Bourbonnais au Limousin, mais il est vrai que, pour l’essentiel, la paysannerie était conservatrice. Depuis, le monde rural s’est profondément recomposé. La France rurale d’aujourd’hui est beaucoup moins une France paysanne qu’une France des oubliés, une France d’ouvriers et d’employés plus qu’une France d’agriculteurs.

http://www.elunet.org/spip.php?article11467

dimanche 15 novembre 2009

Conférence du Cercle Jean-Jaurès le 2 décembre à Lons-le-Saunier


A l’occasion de la sortie de son livre, Recherche le peuple désespérément (Bourin éditeur), coécrit avec Gaël Brustier, le Cercle Jean-Jaurès recevra Jean-Philippe Huelin.

Il viendra nous présenter les principaux enseignements de leur enquête à travers cette France populaire, périphérique et trop souvent délaissée par les politiques comme par les médias. Aussi notre thématique pour cette soirée sera la suivante :

« Reconquérir les couches populaires,
une nécessité pour la gauche »

Cette conférence aura lieu le : Mercredi 2 décembre 2009 à 20h au Centre social de Lons-le-Saunier

A la fin de celle-ci, Jean-Philippe Huelin dédicacera son livre qui sera en vente au prix de 17 €.

Pour vous permettre de préparer cette conférence, un dossier complet sur ce sujet est disponible sur notre site Internet : www.cerclejeanjaures.org

Comptant sur votre présence, nous vous adressons nos amitiés républicaines,

Yves Ayats, trésorier du Cercle Jean-Jaurès

vendredi 13 novembre 2009

La « peur du déclassement », un décor qui cache la rupture sociale

Déclassement ou peur du déclassement ? Le débat qui s'instaure depuis la sortie du dernier livre d'Eric Maurin pourrait permettre à nos élites de feindre d'ignorer plus longtemps la réalité du malaise qui touche la société française. Ce débat, qui ne manque d'intérêt ni intellectuel ni politique, fait pourtant l'impasse sur la dimension géographique de la crise sociale qui frappe notre société. A la lumière de l'analyse spatiale des classes sociales en France on peut sans peine établir que, nonobstant son talent, Eric Maurin livre une analyse partielle et partiale du « déclassement » et que ses thuriféraires, quant à eux bien moins innocents, y trouvent motif à nier la réalité sociale du pays.

Eric Maurin ignore les mutations géographiques

La principale faiblesse de l'analyse d'Eric Maurin réside dans l'ignorance délibérée des mutations géographiques que la France a connues depuis vingt ans. Faire parler les statistiques en ignorant le puissant déterminant géographique du destin des Français, c'est s'aveugler sur le maelström social qui s'est emparé de la France des zones périurbaines et rurales.

Derrière la nouvelle géographie sociale de notre pays il y a l'emprise de l'économie financiarisée sur la localisation de l'activité économique, autre phénomène ignoré par Eric Maurin. Les agglomérations ont en effet, depuis vingt ans, profondément muté. Elles ont expulsé de leur cœur ouvriers et employés (A Paris, la proportion d'ouvriers et d'employés a chuté de 65% à 35% depuis les années 1970). Ceux-ci ont été propulsés aux confins des aires urbaines dans les zones périphériques et dans le rural sous influence urbaine. Cette France-là accumule embûches et difficultés.

En déficit d'emplois, elle concentre des populations en quête d'un logement moins cher mais dont les temps de transports et distances pour aller au travail s'allongent. Cette France de petits pavillons et de petites communes qui se situent en bordure des aires urbaines concentre un nombre croissant d'ouvriers et d'employés et, à bien y voir, une majorité de Français. Cette France-là a exprimé électoralement son malaise et sa révolte en 2002, 2005 et, hélas, a accompagné l'ascension de Nicolas Sarkozy en 2007. Ces différents coups de semonce devraient avoir éveillé l'attention…

La classe moyenne n'est plus vouée à l'expansion

Nous assistons à la fin d'une représentation et d'une vision imposée de la société française. Ce qui était vu comme une grande « classe moyenne » (« deux Français sur trois ») s'engouffre dans les difficultés, la précarité et plonge consécutivement dans un certain malaise collectif. En fait, au contraire de l'idée dominante répandue dans les années 1970, 80 et 90, la « classe moyenne » n'est plus vouée à l'expansion.

Soumise à une forme croissante de ségrégation territoriale, elle est également en proie à un déclassement effectif. Pour preuve, selon Camille Peugny, un fils de cadres supérieurs sur quatre et une fille sur trois exercent, à l'âge de 40 ans, un emploi ouvrier. Ajoutons que, dans l'espace périurbain, la situation des employés est encore plus préoccupante : leur revenu moyen diminue et l'emploi se précarise davantage encore que ceux des ouvriers. Voilà la réalité d'une France qui souffre presque physiquement mais dont on voudrait réduire le malaise à une forme de névrose ou de fantasme collectif.

La précarisation croissante des surdiplômés

Le diplôme est, certes, un frein relatif au déclassement. Mais là encore cette affirmation ignore délibérément deux phénomènes. L'entre-soi des villes-centres et une ségrégation scolaire de moins en moins honteuse favorisent une reproduction sociale que quelques mesures de saupoudrage faites de « diversité » et de bons sentiments sont censées légitimer. L'autre fait tient à la précarisation croissante des surdiplômés. Le phénomène des « intellos précaires », eux bien ancrés géographiquement dans les centres, est-il lui-même marginal ou bien ne révèle-t-il pas le mal profond qui ronge une société qui récompense de moins en moins bien les diplômes ?

Que les Français ressentent une « peur » du déclassement serait, à lui seul et en soi, un fait social préoccupant. Mais on peut se demander si après le « sentiment d'insécurité », la « peur du déclassement » ne va pas servir à camoufler plus longtemps la rupture sociale et spatiale qui existe entre une majorité de Français et une minorité élitaire connectée à la mondialisation néolibérale.

La France dont rêvent les zélateurs du dernier opus d'Eric Maurin est une France de villages Potemkine, un France dans laquelle il fait bon camoufler aux puissants la difficulté à vivre d'une majorité de la population. L'enjeu de la décennie à venir est pourtant de répondre au malaise de cette France déclassée, périphérique et finalement majoritaire. Cela suppose d'abord de retrouver le peuple…

Par Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin | « Recherche le peuple désespérément... | 13/11/2009 |
http://www.rue89.com/2009/11/13/la-peur-du-declassement-un-decor-qui-cache-la-rupture-sociale-125836

mercredi 11 novembre 2009

La peur du déclassement…et l’oubli du peuple

Le livre d’Eric Maurin, La Peur du déclassement, est en train de créer un des débats publics du moment. Même si l’auteur jouit d’une reconnaissance des médias dit de référence (la une du Monde le jour de la sortie du livre !) son analyse n’en demeure pas moins partielle et partiale sur la réalité sociale en France. Trois éléments majeurs peuvent être avancés pour critiquer sa thèse :

De la même façon que l’insécurité il y a quelques temps, le déclassement ne peut aucunement être réduit à un sentiment ou une peur irraisonnée qui ne serait qu’un problème périphérique de la société française. De nombreux indicateurs montrent que la situation sociale se dégrade réellement pour certaines catégories de la population. La souffrance sociale n’est plus seulement l’apanage de la base de la pyramide sociale (« les exclus »), elle est en train de gagner les « couches moyennes » de la société. Le discours psychologisant sur une société malade que les bons experts devraient soigner de ses névroses a un côté paternaliste et misérabiliste des plus détestables. Pour soigner notre société, un divan ne suffira pas !

Par ailleurs, Eric Maurin attribue les raisons de cette peur à une société qu’il qualifie incessamment de « bloquée » par des protections sociales qui mettent à l’abri les détenteurs de CDI et les fonctionnaires mais qui jetterait dans la jungle sociale tous les autres. C’est une vieille thèse franchement néolibérale qui s’est imposée comme un passage obligé de la « pensée unique » des années 90. On comprend les glapissements de Laurence Parisot à la lecture du livre ! L’auteur n’oublie rien de moins que l’entrée dans la globalisation et ses conséquences sur les conditions de travail et sur le niveau des salaires. L’explication d’Eric Maurin, très « franco-française », ne restitue pas la réalité sociale de notre pays dans son contexte mondialisé.

En réalité, nous avons face à nous un statisticien renommé qui oublie le peuple et qui le méprise un peu. De fait, Eric Maurin méconnait la géographie sociale de la France d’aujourd’hui. Cela n’apparaît pas dans sa grille de lecture ; or c’est un élément essentiel pour appréhender la question du déclassement qui est aussi, et de plus en plus, un éloignement du Centre. Cet élément est au cœur de l’analyse de notre livre « Recherche le peuple désespérément » (Bourin éditeur). On ne comprend rien à notre société si l’on ne parle pas de la ségrégation spatiale et sociale que vit la France périphérique, celle qui est obligée de se lever tôt pour aller au travail car le temps de trajet augmente entre le lieu de travail et le domicile. Cette France-là est mise à l’écart de la France des centres à cause d’un prix du logement prohibitif en ville. Le seul espace disponible devient l’espace périurbain voire le monde rural qui accueille de plus en plus « d’exclus des villes ». Pour cette France périphérique, électoralement majoritaire faut-il le rappeler, le déclassement n’a rien d’un fantasme.

Jean-Philippe HUELIN

mardi 10 novembre 2009

Identité nationale : le Code n'est rien sans le glaive


Coauteur du livre « Recherche le peuple désespérément » (Bourin éditeur), Jean-Philippe Huelin se livre ici à une défense de la Marseillaise, le chant de la nation dont il fait distribuer et commenter les paroles en classe lorsque le révolution française est au programme. En mobilisant Renan et Jaures.

A la veille ce jour commémoratif de l’armistice de 1918 et alors que s’engage un débat national sur l’identité de la France, le Jurassien que je suis se demande si l’un de nos symboles nationaux, la Marseillaise, œuvre du Lédonien Rouget de Lisle, n’est pas le meilleur indicateur de l’état de notre « esprit national ».
Avant d’en venir là, permettez-moi quelques mots sur cet étrange débat à propos de l’identité nationale. Je m’étonne d’abord qu’un ministre puisse « imposer » aussi facilement un « débat public » qui ne semble guère rendu nécessaire par l’actualité immédiate. Passons… une fois de plus, en Sarkozie, le « faire-savoir » est cousin du « se faire voir ». Sur de telles bases, il est à craindre que tout débat soit vicié ; la manipulation politicienne est trop visible à quelques mois d’élections régionales qui ne s’annoncent pas sous les meilleurs auspices pour l’UMP.

Sur le fond, la question de la nature de notre identité nationale a été tranchée à la fin du XIXe siècle par Ernest Renan lors de sa fameuse conférence publiée sous le titre « Qu’est-ce que la nation ? » Dans sa réponse, Renan défend une conception citoyenne de la nation qui est pour lui un « principe spirituel » s’appuyant concomitamment sur un héritage commun et un « vouloir vivre ensemble ». Par là, il construit une conception opposée à la vision allemande de la nation qu’avait défendue Fichte au début de ce même siècle et qui avait une nature plus essentialiste et fondée sur le sang. Le débat me semble clos… sauf pour ceux qui ont peut-être le « vouloir vivre ensemble » mais pas l’héritage commun, c’est-à-dire les populations immigrées ou issues de l’immigration récente. Si c’est là-dessus que certains veulent faire porter le débat, alors il s’agit d’un débat sur l’intégration.

Il ne me semble alors pas du tout surprenant qu’à l’heure où l’on chante partout, de la droite libérale à la gauche boboïsée, les vertus de la diversité (nouvelle bannière des élites médiatisées et mondialisées), se pose la question de l’appartenance à une nation. C’est d’autant plus difficile de s’intégrer à une nation pour les immigrés que les élites nationales daubent en permanence l’idée de nation. Or il clair que pour appartenir il faut chercher du commun, du lien. Contre l’atomisation du tout-individuel, la nation doit être un refuge où peut s’épanouir ce qui nous rassemble ; si ce n’est pas l’histoire, ce peut être des principes, des valeurs, des moments, des commémorations, des symboles, des chants…

Nous arrivons donc à notre Marseillaise. On peut toujours en lire les paroles ou la chanter seul mais sa force est dans le chœur et les cœurs qui se réunissent pour la chanter. Chant de guerre, elle est un cri de défense d’un « nous » contre un « eux ». Il est primordial de le rappeler. Sans l’armée de l’an II, pas d’application des droits de l’homme et du citoyen. Le Code n’est rien sans le Glaive. La Marseillaise est l’expression populaire de cet élan civique qui promeut la nation comme acteur de l’Histoire.

A cet égard, on comprend mieux que, dans une France que d’aucuns veulent apaisée et presque endormie, les paroles de ce chant guerrier puissent écorcher des oreilles devenues trop sensibles. Que certains, par provocation, entrainement ou aveuglement, la sifflent parfois lors de certaines rencontres footballistiques n’est qu’un des signes de sa vitalité. En tant que professeur d’histoire-géographie, je peux témoigner que je tiens tout particulièrement à distribuer et à commenter les paroles de la Marseillaise lorsque le programme met au menu la Révolution française. Cela me semble tout à fait profitable car l’amour de la patrie n’est jamais que l’accomplissement d’un parcours de connaissances et d’émotions de chaque individu à qui l’on apprend à s’élever au rang de citoyen. Je pense que la Marseillaise participe toujours pleinement de cette ambition, tout du moins le devrait-elle.

Enfin terminons par une citation de Jean Jaurès. A certains de ses adversaires qui essayaient d’opposer le chant socialiste de l’Internationale et la patriotique Marseillaise, Jaurès ne contourne pas l’expression tant décrié de « sang impur (qui) abreuve nos sillons » et il écrit : « Oui, c'est une parole sauvage. Et pourquoi donc la Révolution l'a-t-elle prononcée ? Parce qu'à ses yeux tous les hommes qui consentaient, sous le drapeau de leur roi et de leur pays, à lutter contre la liberté française, espoir de la liberté du monde, tous ces hommes cessaient d'être des hommes ; ils n'étaient plus que des esclaves et des brutes. (…) Quand la patrie, maniée par les tyrans, devient un instrument de servitude contre l'humanité, l'indiscipline, la révolte, la désertion deviennent l'obligation première : voilà ce que la Révolution française, voilà ce que La Marseillaise crient à tous les soldats du monde.»

Jean-Philippe Huelin - militant PS | Mardi 10 Novembre 2009
http://www.marianne2.fr/Identite-nationale-le-Code-n-est-rien-sans-le-glaive_a182723.html

dimanche 1 novembre 2009

Jean-Philippe Huelin à la recherche du peuple

Un article paru ce jour dans la page locale Delle du journal "Le Pays", édition du Territoire de Belfort de "L'Alsace"

Dellois d’origine, Jean-Philippe Huelin vient de co écrire avec Gaël Brustier un essai politique intitulé « Recherche le peuple désespérément ». Le livre propose une analyse sociale de la France d’aujourd’hui et explique les raisons de la rupture entre les élites et le peuple.

Recherche le peuple désespérément est le fruit d’une étude à la fois sociologique, géographique, historique et politique de la société française de notre époque, et plus particulièrement de la vie des couches populaires lors de ces 30 dernières années.

Les deux auteurs Jean-Philippe Huelin et Gaël Brustier se sont appuyés sur des éléments statistiques officiels et ont puisé leurs sources dans les études de l’Insee.

La souffrance des couches populaires

Aujourd’hui, la population française est composée à 60 % d’ouvriers et d’employés. Ces deux catégories socioprofessionnelles vivent aux marges des villes, loin des centres urbains, voire même dans un espace rural qui se redéveloppe.

Les couches populaires existent et elles souffrent beaucoup de la précarité de l’emploi et de salaires moyens assez faibles.

Cette France a voté non aux élections européennes de 2005 mais, paradoxe, elle a succombé aux promesses électorales de Nicolas Sarkozy en 2007.

Dans leur livre, les deux auteurs ont essayé de mettre à la portée des lecteurs, militants ou non, le fruit d’études sociologiques de nombreux chercheurs. Elles balaient bien des idées reçues : précarisation du travail, chute des citadelles industrielles, protectionnisme, mondialisation, visions des médias, France des oubliés, émancipation des peuples, fonctionnement de la démocratie.

Enfin les auteurs donnent des pistes de réflexion qui pourraient réconcilier le peuple et les élites politiques.

Jean-Philippe Huelin est né en 1979 à Montbéliard, issu d’une famille delloise de longue date. Il a fréquenté l’école des Marronniers, le collège de Delle puis le lycée Condorcet de Belfort où il a obtenu le bac en 1997.

Il a été ensuite étudiant à Strasbourg, d’abord en sciences politiques puis en histoire. Il est aujourd’hui professeur d’histoire-géographie dans le Jura.

Parallèlement, Jean-Philippe Huelin a entamé un parcours politique en adhèrant au Mouvement des citoyens de Jean-Pierre Chevènement en 2000. Un an plus tard, il a été responsable de la section MDC de Delle et membre du secrétariat politique du mouvement. Il a quitté le parti chevènementiste en 2006 et a rejoint le parti socialiste sur les traces de Ségolène Royal.

Jean-Philippe Huelin a connu le coauteur du livre, Gaël Brustier sur les bancs étudiants à Strasbourg. Ce dernier est aujourd’hui docteur en science politique et collabore régulièrement à la rubrique « livres » du Monde diplomatique.

Patrice Boufflers, Le Pays du 1er novembre 2009

LIRE « Recherche le peuple désespérément » est paru en octobre 2009 aux éditions Bourin à Paris spécialisées dans l’édition d’essais politiques. Il est disponible dans toutes les bonnes libraires au prix de 17 €, Fnac et Forum à Belfort mais aussi à l’Intermarché de Delle.

http://www.lalsace.fr/fr/permalien/article.html?iurweb=2146549

samedi 31 octobre 2009

Recherche (le) peuple désespérément, entretien avec les auteurs

Pourquoi ce livre aujourd’hui?

« Recherche le peuple désespérément » vient baliser une première étape de notre engagement politique. Nous avons découvert la politique auprès d’hommes talentueux qui plaçaient toujours le débat d’idées au cœur de leur combat. C’est un sain principe. Et puis maintenant, nous volons de nos propres ailes, en électrons libres au sein d’un Parti Socialiste qui a besoin de revenir à quelques solides repères républicains, à l’idéal socialiste et à une analyse de la société la plus cohérente qui puisse être. Raison de plus pour mener un combat culturel en interne, les militants sont, pour l’heure, plus touchés par nos idées que les dirigeants. C’est un bon début !

Le principal objectif de notre livre est de traduire en termes politiques une somme impressionnante d’études sociologiques, géographiques, démographiques qui permettent de mieux comprendre notre société. Au confluent des discours savants et militants, notre livre donne quelques clés stratégiques.

Vous êtes très critiques vis-à-vis de la gauche politique? Qui aime bien châtie bien? Qu’espérez-vous ?

Nous espérons faire comprendre à la gauche qu’elle ne pourra battre Sarkozy qu’en se dotant d’une vision de la sociologie de notre pays autant qu’en développant un projet alternatif. Il y a chez Sarkozy et ses conseillers une véritable connaissance de la société française mise au service d’une droite radicalisée, presque berlusconnisée. A nous de retrouver un électorat qui nous a fait défaut depuis vingt-cinq ans : les couches populaires. Elles n’ont pas disparu et ce sont elles qui ont fait la décision politique en 2005 comme en 2007 !

Vous remettez au centre du débat, les travaux de nombreux intellectuels lumineux mais méconnus du grand public et des dirigeants politiques. Vous relancez l’idée d’un lien dialectique entre la pensée et l’action. C’est un ressourcement ?

Certains sont bien connus mais marginalisés par les élites : pensons au talentueux Emmanuel Todd. D’autres, dans l’ombre, poursuivent un travail intellectuel de première importance, on doit citer ici Christophe Guilluy et les nouvelles fractures sociales et territoriales ou encore Nicolas Renahy, un chercheur en sociologie qui travaille sur la jeunesse ouvrière et rurale. Il y a, parmi les chercheurs français, quantité de femmes et d’hommes dont les écrits ne semblent pas intéresser les responsables politiques… Il faut retisser des liens entre ceux qui contribuent à l’intelligence de la société et ceux qui s’attachent à imaginer une alternative politique.

Parlons aussi de chercheurs en science politique étasuniens comme Thomas Franck dont les travaux sont essentiels. A fortiori, remarquons qu’aux Etats-Unis, il existe des « professionnels de la politique », comme Joe Trippi, qui s’efforcent de penser la société américaine et les méthodes pour bâtir des alliances électorales durables.

N’oublions pas non plus que les chiffres les plus alarmants sur l’état de la société française se lisent très facilement dans les publications de l’INSEE. Au-delà des titres, censés rassurer les ministres, le contenu de leurs études est édifiant !
Votre étude de ce que l’on pourrait appeler une nouvelle géosociologie des territoires est lumineuse notamment sur l’implantation des couches populaires (ouvriers, employés) dans notre pays. Vous appelez la gauche à s’intéresser aux couches populaires des zones périurbaines et rurales largement oublié par la gauche politique. Pouvez-vous en dire plus?

Cette France invisible, celles des périphéries (périurbaines et rurales) est tout simplement la France majoritaire ! Pour nous, il s’agit d’inviter la gauche française, dans sa diversité, à s’intéresser à cette France là, à la comprendre, à lui parler. C’est un travail d’autant plus difficile que, dans certains milieux de gauche, le peuple est déprécié, considéré assez négativement. La percée du FN chez les ouvriers, le vote « Non » en mai 2005 ou même le vote pour Nicolas Sarkozy de la « France qui se lève tôt » ne sont analysés que sous un angle moral, pour ne pas dire moralisateur.

Il s’agit, selon nous, de bâtir, une coalition sociale majoritaire avec des classes sociales qui, d’une part existent encore et, d’autre part, adhèrent encore aux principes et aux idéaux républicains. L’état de l’opinion publique après l’affaire de l’EPAD laisse entendre que notre peuple adhère très majoritairement à un idéal d’égalité…

Vous appelez la gauche à tenir compte du vote du 29 mai 2005 où les couches populaires ont largement contribué à la victoire du non. N’est-ce pas être à contre-courant de l’histoire ?

Le 29 mai est un fait. C’est un fait électoral révélateur de nombreux faits sociaux. On peut interpréter le vote du 29 mai de nombreuses façons. Nous retenons, pour notre part, une interprétations sociale et spatiale en lien avec la mondialisation. Nous y voyons, quoi que l’on pense par ailleurs de l’actuel traité de Lisbonne, la manifestation d’un « principe de précaution démocratique » qui a sanctionné la politique du choix unique des élites et la manipulation des symboles démocratiques. Oui, la Gauche doit appréhender les craintes des classes populaires. Oui, elle doit s’adresser à cette France du « non » qui n’est pas une France nationaliste, xénophobe ou repliée mais une France qui souffre et qui appelle ses dirigeants à remettre en avant des principes et des idéaux républicains.

Vous estimez nécessaire que la gauche fasse une critique radicale du libre-échange largement véhiculé par la gauche française. Pensez-vous être entendus ?

C’est un débat, pour l’instant interdit par le conformisme ambiant, qu’il va falloir mener. Le PS devra bien choisir entre d’un côté Pascal Lamy et Dominique Strauss-Kahn, idiots utiles du néolibéralisme, et les analyses d’Emmanuel Todd ou Jacques Sapir de l’autre qui avancent des propositions sur le protectionnisme européen. Comment expliquer à l’électorat populaire qu’il est acceptable de contempler béat et les bras ballants la désindustrialisation de notre continent !

Vous semblez lier la possible victoire politique de la gauche au ressourcement du lien de la gauche avec les couches populaires. Alors que de nombreux dirigeants de la gauche se lamentent d’avoir perdu le soutien des couches populaires et appellent à une meilleure communication, vous dîtes que c’est à la gauche de changer de ligne stratégique. Vous leur demandez un travail de titan !

Les pleureuses sont les bienvenues dans les enterrements siciliens. Il est à souhaiter que la gauche française n’est soit pas encore là ! Rien n’est définitivement perdu pour la gauche, ni le peuple, ni les élections à venir. Il est pour autant certain que les couches populaires n’accepteront de faire à nouveau confiance à la gauche que si elle présente à la fois un nouveau visage et un autre programme que l’accompagnement social du néolibéralisme. Travail de Titan ? Pour qui a un peu de sens du bien commun et d’ambition pour son pays, il semble que ce ne soit pas une mission impossible.

Dans l’état actuel des choses, bien que vous soyez membres du PS, vous ne semblez ni être suivi par la direction du PS, ni par les dirigeants du Front de gauche et du NPA. Vous vous préparez à une longue marche ?

Yan’an est en vue ! Au moins avons-nous un cap et une stratégie ! C’est déjà beaucoup et, de plus, nous ne comptons que sur nos propres forces ! Si l’on est raisonnable, il convient de constater qu’il y a dans notre pays, au-delà des clans, des écuries présidentielles et des groupuscules, des ressorts intellectuels et moraux qui peuvent nous permettre de bâtir ce socle sociologique et majoritaire stable qui seul pourrait engager une politique de redressement républicain. A nous de nous rassembler pour ce faire.

Propos recueillis auprès des auteurs du livre Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin par Bernard Teper
http://www.gaucherepublicaine.org/respublica/recherche-le-peuple-desesperement-entretien-avec-les-auteurs/1150

Le livre sur le PS qui va faire peur à Ségolène Royal, Manuel Valls et Benoît Hamon!, par Bruno Roger-Petit

Encore un livre qui va provoquer bien des remous au sein du PS. Et qui va heurter de plein fouet les tenants archéos-néos de la gauche morale. De quoi s'agit-il?

Le livre s'intitule « Recherche le peuple désespérément » et il entreprend l'examen sans concession du divorce de la gauche (surtout le PS) avec le peuple. Le constat de Brustier et Huelin est en effet accablant. Les classes populaires, ouvrières, précaires, la jeunesse, les exclus, les chômeurs, toutes ces couches qui devraient voter PS ne votent plus pour l'ancien parti de Jaurès, Blum et Mitterrand. Comment le pourraient-elles d'ailleurs, dans la mesure où les ouvriers représentent aujourd'hui 5% des adhérents du PS contre 10% en 1985?

L'intérêt du livre est de s'attaquer aux causes de ce divorce en délivrant une grille de lecture originale qui n'est pas sans rapport, du reste, avec l'identité française. Les auteurs se livrent donc à un examen tout simple: la géographie sociologique du pays. Ils démontrent brillamment comment la France s'est coupée en deux depuis trente ans. Il existerait une France urbaine, « boboïsée », cool, aisée, élitaire. Et au delà de ces centres urbains, à la périphérie, dans les banlieues, dans les campagnes, s'est développée une autre France, abandonnée, précarisée, exploitée, délaissée. Une autre France, méprisée, moquée, vilipendée. Une France d'en bas qui ne montera jamais, sans espoir, sans perspectives. Une France qui travaille plus pour gagner de moins en moins. Une France de vieux et de jeunes que le système laisse sur le bas côté, à commencer par le PS.

Exemple: les auteurs expliquent ainsi (entre autres) le phénomène du CNPT. La chasse, activité ludique est victime de tous les clichés du politiquement correct. Pour les prototypes comme le Hamon ou le Valls, coupés des vraies gens par 25 ans passés à hanter les officines du PS, le chasseur est un con rural, raciste et bas de plafond. Le vote chasseur est ainsi devenu le vote identitaire et réactif d'une bonne partie des oubliés ruraux de la gauche. Et les chasseurs ne sont pas les seuls à se replier sur des votes anti-PS, qui mènent au FN ou au sarkozysme.

Cela étant, les auteurs offrent au PS sur un plateau les clés politiques de la reconquête populaire, car cette France oubliée, méconnue, niée est aujourd'hui socialement majoritaire.

D'abord, ils déconseillent le recours à la simili gauche ultra, de Besancenot à Autain, les idiots utiles du sarkozysme, occupés à défendre dans les cafés branchés du centre de Paris des causes médiatiquement majoritaires mais populairement minoritaires.

Le PS doit aussi retrouver l'équation qui fit les grands succès de la gauche sous Mitterrand. Le PS doit renouer le fil qui permet d'identifier une majorité sociale et la muer en majorité politique. Au début des années 80, le PS avait théorisé cet objectif autour de la notion de Front de classe. Aujourd'hui, les auteurs proposent la constitution d'une « coalition sociale majoritaire » appuyée sur un « projet républicain ». C'est à peu près la même chose. Et ça peut donner les mêmes résultats. Mais pour y parvenir, il ne faut pas avoir peur d'être socialiste, de sortir de Paris, de parler avec des vraies gens, de prononcer des mots comme « ouvrier », « peuple », « classe sociale »... Tout un programme...

La conclusion s'impose d'elle même. Si le PS veut regagner la confiance des classes sociales abandonnées à la bordure des grandes villes, il doit absolument renoncer à la posture morale et boboïsée surfant sur la vague de l'émotion médiatique, falsificatrice et manipulée qui règne sans partage sur les centres villes devenus des ghettos élitaires. S'en prendre aux moeurs de Frédéric Mitterrand ne suffit pas à faire peuple, car cela ne règle pas les problèmes de ce même peuple et ça l'incite à voter pour l'original incarnant l'ordre moral. Simple non?

Bruno Roger-Petit, le 31 octobre 2009

http://www.lepost.fr/article/2009/10/31/1768226_encore-un-livre-sur-le-ps-qui-va-faire-peur-a-valls-et-hamon.html

jeudi 29 octobre 2009

Construire une nouvelle alliance avec les couches populaires

Pourquoi la disparition de la classe moyenne affecte en priorité le parti socialiste ?

Elles reviennent dans l’actualité comme les feuilles en automne. Régulièrement, on se penche sur leur cas. Triomphantes voilà trente ans, on analyse aujourd’hui leurs difficultés, on les dit oubliées, précarisées… martyrisées. Mais qui sont donc ces classes moyennes ?

Quand on le demande aux Français par voie de sondage, tous ou presque se sentent en faire partie : parmi les 20 % disposant des revenus les plus hauts, 79 % se rangent sous la bannière « classes moyennes » ! De l’autre côté de la pyramide sociale, il y a près de 30 % des ouvriers qui pensent aussi en faire partie ! S’il y a un concept sociologique floutant, voire masquant, celui de classes moyennes détient véritablement la palme. Inventée au XIXe siècle, la classe moyenne a vu sa définition lentement se transformer pour finir par englober près des trois quarts de la population. Les sociologues sont d’ailleurs incapables d’en fixer les limites « scientifiques ». Quels critères retenir en effet : la profession, les revenus, le patrimoine, le niveau culturel ? Il faut dire que la dénomination marxiste (et peu flatteuse) de « petit-bourgeois » a progressivement laissé la place à « classe moyenne », au singulier puis au pluriel, plus policé, apparemment scientifique et presque technocratique, suffisamment engageante et édulcorante pour devenir une sorte de mythe pour société enfin « apaisée ».

Il y avait bien une vision idéologique de la société derrière le concept de « classe moyenne ». C’était la promesse d’une sortie des luttes de classes ; l’aspiration à cette fameuse classe moyenne ayant pour but de freiner la contestation de l’ordre établi. Les plus anciens se souviennent peut-être du livre de Valéry Giscard d’Estaing, Deux Français sur trois, qui entendait construire une majorité politique sur les bases sociales de la classe moyenne. Pendant les années 1970, la croissance soutenue pouvait encore laisser croire que l’intégration des couches populaires était en marche, que l’embourgeoisement était au bout du chemin. Il ne devait rester qu’une petite couche marginale de démunis et d’exclus à la base et une élite discrète au sommet. Le rêve est passé, la réalité est tout autre. Déjà la fin de la guerre froide avait ébranlé les fondements de cette « société moyenne » mais les coups de boutoir de la globalisation ont fait exploser le pacte social qui reposait sur une certaine retenue des classes dirigeantes. L’explosion des revenus des plus riches depuis dix ans est aujourd’hui insoutenable : + 11,3 % chez les 5 % les plus riches, 19,4 % chez les 1 % les plus riches et même 42,6 % chez les 0,01 % les plus riches (chiffres de Camille Landais). Course folle vers la démesure ? Absolument. Dislocation des intérêts communs à la classe dirigeante, comme l’analyse Emmanuel Todd ? Certainement. Mais, surtout, exposition de richesses qui détruit ce qu’Orwell appelait la « common decency », cette morale populaire faite d’honnêteté, de respect du bien commun et d’une certaine frugalité. Aujourd’hui, le sens de l’ascenseur social s’est inversé : on ne monte plus, tout le monde descend (ou le craint). Le risque de déclassement sape les fondements de cette société moyenne, ce qui ne va pas sans conséquences politiques.

Depuis le référendum sur le traité constitutionnel européen de 2005 et « l’entrée en fureur des classes moyennes » (E. Todd), nous vivons une sorte de crise terminale de la social- démocratie européenne car c’est elle qui s’était le plus appuyée sur la mythique « classe moyenne ». Presque partout en Europe, les partis socialistes et sociaux-démocrates sont empêtrés dans leur promesse du confort petit- bourgeois pour tous. À force de réduire le progrès social à un simple progrès technique, matériel et finalement individuel, à force de céder les leviers de commandes économiques et financiers par « acclimatation » (soyons polis) avec les intérêts de l’élite, ces dirigeants ont perdu toute emprise sur la marche du monde. En France, ce rabougrissement intellectuel peut s’observer dans le comportement du PS. Ayant perçu la disparition programmée de cette vaste classe moyenne et donc de son principal vivier électoral, le PS n’a pourtant jamais osé théoriser une nécessaire refondation sociologique. Plutôt que d’affronter cette nouvelle réalité sociale en face, comme à son habitude, le PS biaise et se raccroche aux branches : c’est d’abord l’appel souvent caricatural à la « banlieue » comme pour cacher son désintérêt des couches populaires (la majorité des plus pauvres ne vivent pas en banlieue), puis ce furent les bobos comme roue de secours provisoire. Le PS s’est ainsi perdu en ville : centres anciens boboïsés et proches banlieues médiatisées sont les seuls espaces considérés. Or cette France-là est minoritaire, sociologiquement comme électoralement.

Finalement, le grand impensé de la gauche en général et du PS en particulier, c’est le peuple. Après les avoir trop longtemps méprisées, la gauche doit aujourd’hui se tourner vers les couches populaires car elles sont le plus touchées par les conséquences de la mondialisation financière. Elle doit construire une nouvelle alliance de classe, rassemblant les perdants objectifs de la globalisation, pour former une coalition sociale majoritaire qui lui permette d’exercer le pouvoir dans la durée. Rien d’impossible mais le travail sera long…

Jean-Philippe Huelin, militant socialiste, coauteur de recherche le peuple désespérément (bourin éditeur).

http://www.humanite.fr/2009-10-29_Idees-Tribune-libre-Histoire_Construire-une-nouvelle-alliance-avec-les

mercredi 28 octobre 2009

Recherche (le) peuple désespérément, par Bernard Teper


Nous vous le disons d'emblée, c'est le livre politique de l'automne pour tous les militants et citoyens éclairés. Vous arrêtez de suite le livre que vous êtes en train de lire, il attendra bien les longues nuits d'hiver. Vous pensiez en acheter un autre ? Retardez cet achat et précipitez-vous pour acquérir avant qu'il ne soit épuisé le livre qui a le même titre que cet article. Il est édité aux éditions Bourin. Que dites-vous ? Un autre journal vous en conseille un autre ? Changez de journal ! Vous avez un emploi du temps qui ne vous permet pas de lire ? Supprimer vos prochaines réunions familiales et galantes, repoussez au lendemain les activités militantes à l'efficacité douteuse, sachant que beaucoup de lignes stratégiques organisationnelles sont à "l'ouest" comme disent les "djeuns"!

Vous souhaitez connaître les auteurs? Sachez d'abord que la somme de leurs âges est inférieure au mien ! Sachez ensuite que j’écris cette recension car j'en ai un peu marre de tous ces " jeunes cons" qui ressemblent tellement par mimétisme aux "vieux cons" de ma génération. Je ne suis pas sensible au jeunisme. Mais lorsque certains d’entre eux montrent une voie de reconstruction, écoutons-les ! Pourquoi ? Pour redresser les lignes stratégiques obsolètes de la gauche toute entière, gauche de la gauche comprise. Ce n'est pas encore fait avec ce livre, mais les trois premiers chapitres en donnent les prémisses sans nul doute. Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin en ont fixé les bases sociologiques nécessaires. Car c'est bien là que toutes les lignes stratégiques de gauche ou d'extrême gauche font défaut. Après ce que d'aucuns appellent improprement "les trente glorieuses", puis la mondialisation néolibérale et enfin le turbocapitalisme, phase actuelle du capitalisme, énormément de choses ont évolué, y compris la sociologie des classes sociales et surtout leur enracinement spatial.
En lisant ce livre, on comprend pourquoi ceux qui n'ont comme univers que les villes-centres et les lieux de vacances pour bobos, qui ne voient plus de couches populaires dans leur vie courante, qui estiment que les couches populaires (ouvriers, employés) n’existent que dans les quartiers des communes de banlieues appelés pour la circonstance "quartiers populaires", ont en fait une vue déformée de la réalité et donc reproduisent des schémas obsolètes, produits par des médias aux ordres du néolibéralisme et repris par les organisations de gauche dans leurs lignes stratégiques
Ce livre concentre, en quelques dizaines de pages, les résultats des travaux de nombreux chercheurs bien répertoriés dans une bibliographie impressionnante mais directement connectée au texte lui-même. Cela est pour les militants et les citoyens éclairés de première importance ! On peut donc lire le texte lui-même ou on peut aller chercher des développements dans la bibliographie et je peux vous dire que vous en ressortez plus intelligent qu’avant.
Nous comprenons enfin pourquoi le PS de François Mitterrand a gagné en 1981 et pourquoi le PS de Jospin, Hollande et Royal a perdu par la suite. La messe est dite quand on sait que Lionel Jospin, lors du premier tour de la présidentielle de 2002, perd près des trois-quarts des couches populaires qui ont voté François Mitterrand au premier tour de la présidentielle de 1981 et que Ségolène Royal ne fait qu’un peu plus du double de Jospin et perd donc environ 40 % des voix qui se s’étaient reportés sur François Mitterrand au premier tour de 1981. Elle y est même devancé dans les couches populaires par… Nicolas Sarkozy lui-même ! Un comble ! Ségolène Royal est donc qualifié au second tour mais ne rassemble alors que la moitié des voix des couches populaires alors que François Mitterrand a eu au deuxième tour les trois-quarts de ces voix.
Le premier enseignement du livre est donc : qui veut gagner le droit d’administrer la France doit reconquérir d’abord les couches populaires, puis l’ensemble de la gauche.

Mais cela ne suffit pas. Il faut comprendre les modifications de la réalité depuis lors.
Nous voyons, directement en lisant ce livre, comment la mondialisation néolibérale a profondément modifiée la sociologie française. Nous voyons que, contrairement à ceux qui ont cru à la fin de la classe ouvrière et des couches populaires, ces dernières sont majoritaires dans le pays et donc que les couches moyennes dont on parle tant sont toujours minoritaires dans le pays. Nous voyons la recomposition sociologique s’effectuer dans quatre types de territoires : villes-centres, banlieues, zones périurbaines et zones rurales. Nous y voyons que les deux derniers espaces sont méconnus, oubliés, voire méprisés par tous les partis de la gauche, gauche de la gauche comprise. Nous comprenons mieux pourquoi le Front national a pu un temps s’y engouffrer. Qui sait que dans les zones rurales les couches populaires sont 5 fois plus nombreuses que les paysans pris au sens large ! Voilà qui va surprendre des militants et des citoyens éclairés !
C’est le deuxième enseignement de ce livre : la gauche ne peut gagner que si elle parle aussi aux couches populaires des zones périurbaines et rurales !

Mais cela ne suffit pas. Il faut comprendre comment se déterminent les couches populaires. Le non au traité constitutionnel européen a gagné principalement grâce à une mobilisation sans précédent des couches populaires des banlieues, des zones périurbaines et des zones rurales.
C’est le troisième enseignement de ce livre : si la gauche veut gagner, elle doit reconstituer le bloc sociologique majoritaire réalisé le 29 mai. Car les villes-centres concentrent principalement les gagnants de la mondialisation néolibérale. Et les banlieues, les zones périurbaines et les zones rurales, principalement les perdants. Voilà donc l’alliance majoritaire potentielle pour la gauche.
C'est le quatrième enseignement de ce livre : la bataille pour l’hégémonie idéologique de la gauche dans les banlieues, dans les zones périurbaines et dans les zones rurales devient donc centrale. Ceux qui ont organisé ou pris la parole dans les zones périurbaines et rurales pendant la bataille du non au TCE ont-ils remarqué qu’il y avait plus de monde pour participer aux réunions d’éducation populaire dans les zones rurales et périurbaines que dans les villes-centres ? De ce point de vue, les organisations qui ont répondu à l’appel de l’UFAL pour mener dans tout le pays une campagne d’éducation populaire tournée vers l’action ont vu juste. Comment expliquer autrement que lors de cette campagne d’éducation populaire tournée vers l’action, il y ait fréquemment un public beaucoup plus important sur une ligne de classe dans les zones rurales et périurbaines que dans les villes-centres !

Mais ce n’est pas tout. Pour retisser le lien avec les couches populaires, il convient de comprendre qu’ils ont compris où se situent leurs intérêts.
C’est le cinquième enseignement du livre : si la gauche veut gagner, elle doit reprendre le chemin des discours sur l’émancipation humaine, de la lutte pour la démocratie y compris au sein des organisations, elle doit comprendre que la lutte contre le libre-échange est une nécessité, que l’aspiration à l’égalité des couches populaires ne sera pas satisfaite par l’ersatz de l’équité ! L’aspiration à la république égalitaire ne sera pas détournée vers l’acceptation de l’apartheid social organisé par un communautarisme de quotas de visibilité !
Trois regrets : il manque une réflexion profonde sur la laïcité (pourtant sous-jacente dans les propos du livre) et un approfondissement des alternatives au libre-échange. Sur ce dernier point, il est dommage que le néo-protectionnisme altruiste, écologique et social ne soit pas présenté comme une alternative au libre-échange et au vieux protectionnisme de la droite. Enfin, on pourrait ajouter au livre que les sujets qui intéressent les couches populaires (emploi, précarité, protection sociale, logement, services publics, école, vivre ensemble et laïcité) sont ceux qui ne sont pas ou peu représentés dans les universités d’été des « grandes organisations », le PS à la Rochelle, le PC au Vieux-Boucau, le NPA à Port-Leucate ou le PG à Clermont-Ferrand ou ATTAC à Arles.
Mais ne ménageons pas notre satisfaction à la lecture de ce livre. Et comme nous sommes favorables à votre satisfaction, il est impératif que vous lisiez ce livre et que nous vous nous en fassiez à votre tour une recension. Nous attendons vos avis. Car c’est sur les sujets de ce livre que doivent se déterminer les débats politiques de la période. En tout cas pour ceux, militants et citoyens éclairés, qui veulent oeuvrer à la transformation sociale avec une coalition sociale majoritaire. Les autres peuvent continuer à lire leurs autres médias favoris...

Bernard TEPER

http://www.ufal.info/media_flash/,article,719,,,,,_Recherche-le-peuple-desesperement.htm

jeudi 22 octobre 2009

A la recherche du peuple perdu

Laurent Bouvet signe une recension de notre livre sur le site nonfiction.fr

Résumé : Cet essai stimulant définit les enjeux contemporains du défi historique de la gauche française : retrouver le chemin du peuple ou mourir.


Dans un court mais substantiel essai, deux jeunes auteurs (l’un est docteur en science politique et l’autre professeur d’histoire-géographie) que l’on devine proches du Parti socialiste, partent à la recherche du peuple perdu. Perdu par la gauche.

Pour tenter de le retrouver, ils s’appuient avec précision et pertinence sur les principales enquêtes et thèses sociologiques de ces dernières années concernant l’évolution de la stratification sociale française (« déclassement », « descenseur social », « égalité des possibles », « désordres du travail », « condition ouvrière»…) et rappellent, utilement, les résultats électoraux de la gauche dans les milieux populaires lors des derniers scrutins .

Gaël Brustier et Jean-Philippe Huelin déploient leur argumentation en trois temps.

D’abord sous la forme d’un réquisitoire, désormais classique même s’il est toujours bienvenu, contre l’abandon par la gauche (toutes les familles politiques en prennent d’ailleurs pour leur grade à fort juste titre) des catégories populaires – principalement les « ouvriers » et les « employés » des CSP de l’INSEE. Les élites de gauche (comme de droite) non seulement ne pensent plus au peuple – il y a quelque chose de « laschien » dans la critique des deux auteurs – mais elles finissent même par le détester. Les auteurs exposent ainsi la « prolophobie » qui anime les représentants de ces élites politiques et médiatiques, éloignées géographiquement (le centre des villes, les voyages d’une capitale à l’autre…) et sociologiquement (« bobos », cadres supérieurs et professions libérales…) de leurs concitoyens . Ils se concentrent sur la protection de leurs intérêts et de ceux de leurs enfants et s’abritent des effets et des risques de la globalisation . Le tableau dressé de la situation et des préférences politiques des désormais fameux « bobos », ces habitants des centre-villes gentrifiés refusant d’abandonner une « sensibilité de gauche » souvent réduite au libéralisme culturel (celui des mœurs et des droits étendus) et au culte de la « diversité », et qui forment le cœur de l’électorat socialiste et vert depuis maintenant des années, est juste et savoureux.

Deuxième temps de la démonstration : la mise en évidence, déjà beaucoup moins classique dans un essai politique, d’une « France invisible ». Identifiée ici à la périphérie lointaine des villes, à un au-delà de ces « banlieues » auxquelles la gauche a si souvent réduit son horizon social ces dernières décennies. Cette périphérie, c’est notamment celle des « petits-moyens » habitant dans les zones pavillonnaires et de ces différentes catégories sociales éparpillées dans un espace rurbain ou rural. Ce sont eux, les oubliés du système et surtout de la gauche qui doit impérativement, comme le disent les auteurs, repenser la logique de « l’individualisme populaire » à l’œuvre dans cette France-là. Ses habitants ne sont pas assez « exclus » pour être la cible des politiques mises en place par les gouvernements socialistes des années 1980-90 (politique de la ville, politique de lutte contre l’exclusion…) mais ils ne sont pas davantage considérés par les médias et les « décideurs » installés dans les centres urbains – là pourtant où ils travaillent en nombre.

Le biais géographique privilégié par les auteurs nous aide à mieux saisir une réalité sociale souvent occultée et parfois oubliée : ces habitants de la France d’au-delà (et non plus d’en-bas donc) souffrent, et dans un relatif silence politique, celui de l’abstention notamment. Plus intéressant encore, les auteurs nous montrent combien ils sont « divers » sans pour autant participer à la « diversité » partout affichée comme un bienfait en soi et une solution aux problèmes sociaux . C’est sans doute là un des points les plus suggestifs du livre : montrer combien la richesse de cette société reléguée en arrière-plan des paysages qui défilent à grande vitesse lorsque les insiders prennent le TGV ou l’avion, est représentative de la France telle qu’elle est et non telle qu’on la voudrait ou la souhaiterait dans les grandes rédactions parisiennes ou dans les QG des partis politiques.

Pour finir, les auteurs lancent quelques pistes qui peuvent permettre de sortir de la double situation d’enfermement des classes populaires et d’échec de la gauche au plan national. Ils prônent la mise en place d’une « coalition sociale majoritaire » autour d’un « projet républicain » pour enfin sortir de l’impasse politique, économique et sociale dans laquelle s’est enfoncé le pays . Cette dernière partie est malheureusement trop courte et la moins aboutie de l’ensemble, c’est dommage. Cela ne peut que rendre le lecteur encore plus impatient dans l’attente d’un « tome 2 » indispensable… avant 2012 !

Par Laurent Bouvet sur le site nonfiction.fr
http://www.nonfiction.fr/article-2865-a_la_recherche_du_peuple_perdu.htm