vendredi 7 août 2015

Rue Maurice Joly

Une nouvelle rue ouverte à Lons-le-Saunier rend hommage à un Lédonien méconnu. Ayant plaidé pour ce choix, me revient la mission d'éclairer mes concitoyens sur sa vie. Un début de réponse ci-dessous :

Maurice Joly est né à Lons-le-Saunier le 22 septembre 1829 dans une famille bourgeoise ; son père fut conseiller général du Jura sous Louis-Philippe. 

Il fait des études de droit qu'il interrompt en 1849 pour aller à Paris où il travaille pendant sept ans au ministère d’Etat (sorte de ministère de la culture chargé de célébrer le Second Empire). Parallèlement il prépare sa licence de droit et réussit à entrer au barreau de Paris en 1859. 

Sous les conseils de son compatriote, Jules Grévy, il écrit des portraits d’avocats du barreau qu’il rassemble en 1863 sous le titre : Le Barreau de Paris, études politiques et littéraires

Sa détestation du régime impérial le pousse à écrire César et surtout le Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu en 1864. Sous couvert d’une discussion philosophique, c’est une charge contre Napoléon III. Ne pouvant le faire éditer en France à cause de la censure, il le publie anonymement à Bruxelles. Après une rapide enquête de police et une perquisition à son domicile, Maurice Joly est démasqué puis condamné à 18 mois de prison à Sainte-Pélagie pour « excitation à la haine et au mépris du gouvernement » qu’il effectue à la suite de 6 mois de détention provisoire.

Libéré en 1867 mais amer, il écrit Recherches sur l'art de parvenir en 1868, une satire sur les mœurs du temps. Marginalisé, il gagne tout de même la confiance de quelques républicains argentés qui lui permettent de créer un journal, Le Palais, journal de critique judiciaire, politique et littéraire, qui publie 63 numéros de novembre 1868 à juin 1869. 

Vient la chute de Napoléon III. Maurice Joly participe à la Commune de Paris et défend la poursuite du combat contre la Prusse par patriotisme. Républicain forcené, il est écarté par ses amis républicains que l’on a appelés opportunistes, comme Gambetta et Grévy, de tout poste de responsabilité. Amer, il se rend compte que la « République française » ne vaut ni ne fait mieux à cet égard que l'« Empire » français. Il se suicide le 14 juillet 1878 à son domicile du 5 quai Voltaire à Paris. 

Plus de 20 ans après sa mort, un agent secret du tsar à Paris plagie son Dialogue aux enfers pour créer les Protocoles des Sages de Sion, œuvre antisémite majeure. Ce texte en reprend notamment des passages sur la nature humaine et les moyens de manipuler les masses - par l'attrait de l'argent, de la liberté et du pouvoir notamment. La politique permettant au Second Empire d'avoir la mainmise sur la société française d'après Maurice Joly devient celle d'une conspiration juive cherchant à dominer le monde entier.